IV. 79 – Astana V (Kazakhstan), (4-5 juillet 2017).
Genève (Suisse), (10-14 juillet 2017).
Des efforts divergents ?…
Pourparlers d’Astana (Kazakhstan),
les 4-5 juillet 2017
En Syrie, le 2 juillet, l’armée légale instaurait une trêve, de façon unilatérale, aux environs des villes de Daraa, Quneitra, Suweyda, dans le sud du pays, trêve qui devait être effective jusqu’au 6 juillet.
Dans le même temps, le 3, les Pourparlers d’Astana commençaient : étaient présent(e)s une délégation du gouvernement syrien et quelques groupes d’opposition, les représentants du président Vladimir Poutine et du ministre des Affaires Étrangères Sergueï Lavrov pour la Russie, le vice-ministre pour l’Iran, et le vice-ministre pour la Turquie. Le représentant de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, et une délégation représentant la Jordanie étaient également convié(e) à ces pourparlers. Quant au haut représentant des États-Unis, il n’était là qu’à titre d’observateur.
Depuis décembre 2016, la violence a quelque peu diminué sur les fronts tenus par les opposants armés appuyés par l’Arabie saoudite et la Turquie ; cependant, la lutte de la Syrie et des pays qui lui sont alliés contre l’ÉI (État Islamique) ne pouvait que se poursuivre. À Astana, il s’est agi d’instaurer les zones de désescalade, prévues lors des Pourparlers de mai, afin d’obtenir un renforcement du cessez-le-feu maintenu dans diverses régions, excepté dans celle de Wadi Barada, au nord-ouest de la capitale Damas, de faciliter l’accès aux secours humanitaires, et de discuter de la reconstruction de la Syrie.
Les Pourparlers d’Astana, qui ont été co-organisés, pour la première fois en janvier 2017, avec l’appui de l’Iran, par la Russie (alliée de la Syrie) et la Turquie (alliée de l’opposition), sont considérés, par les pays occidentalo-golfico-sionistes, qui ne sont pas pressés de voir s’achever la guerre contre la Syrie, comme un événement concurrent des négociations de Genève qui ont lieu sous l’égide de l’ONU. Les Pourparlers d’Astana s’attachent précisément aux questions militaires et techniques alors que les négociations de Genève, d’ordre politique, ont, jusqu’ici, échoué parce que les quelque pays, qui font la guerre à la Syrie plus qu’à l’ÉI (État Islamique), cherchent à dominer les débats et veulent absolument s’ingérer dans les affaires intérieures de la Syrie, faire fi des élections présidentielles de juin 2014, remplacer le président réélu Bachar El Assad par un président fantoche et renverser le gouvernement ; bref ! quelques pays tentent d’aller à l’encontre des souhaits du peuple syrien et de décider à sa place. Faire durer la guerre, pour obtenir un maximum de destruction (en vue de la reconstruction), est un des moyens de pression qu’utilise la coalition occidentalo-golfico-sioniste sur les autorités de la Syrie. Cette coalition, avec les armes qu’elle met en œuvre, provoque plus de morts dans la population civile que l’ÉI (État Islamique) lui-même. Au sortir de cette guerre, les coalisés, qui combattent la Syrie tout en clamant défendre le peuple syrien, devront répondre de leurs décisions, de leurs actes et de leur bilan.
Négociations de Genève (Suisse),
du 10 au 14 juillet 2017
Juste après les Pourparlers à Astana, la 7ème réunion de négociations à Genève a eu lieu, du 10 au 14 juillet, en présence notamment de l’ambassadeur de Syrie à l’ONU, Bachar Al-Jaafari. Les discussions devaient porter sur quatre questions : l’élaboration et la rédaction d’une nouvelle Constitution ; la gouvernance qui masque les véritables desseins des pays ennemis du président Bachar El Assad et du gouvernement, qui veulent imposer au peuple syrien, coûte que coûte et par la voix de différents représentants de l’opposition parmi lesquels figurent des membres du Haut Comité syrien des négociations, une transition politique ; la préparation d’élections – comme s’il y avait urgence à changer les structures politiques et économiques du pays – alors que Bachar El Assad a été réélu en 2014 et que la Syrie n’est pas encore libérée ; enfin, la lutte contre le terrorisme que les pays fauteurs de guerres ont produit dans les pays asiatiques comme l’Afghanistan, dans les pays du Maghreb comme la Libye, dans les pays arabes comme l’Irak et la Syrie, et que les dirigeants de ces pays fauteurs de guerre voient arriver, non sans un certain frisson… non pas tant par souci de leurs populations respectives que par crainte d’être touchés eux-mêmes et de voir combattu leur système politico-économique.
G20, Hambourg (Allemagne),
7-8 juillet 2017
Le cessez-le-feu, la création de zones de désescalade, etc., n’ont pas été à l’initiative des participant(e)s aux négociations de Genève, mais à celle des participants aux Pourparlers d’Astana… Même la décision d’une trêve dans le sud de la Syrie, prise d’un commun accord, le 10 juillet, entre Vladimir Poutine et Donald Trump, n’a pas eu le cadre des négociations de Genève mais celui d’une réunion du G20 à Hambourg… qui – soit dit en passant – a été l’occasion d’échauffourées entre la police et des manifestant(e)s accouru(e)s des divers Länder de l’Allemagne mais aussi de pays étrangers : Grande-Bretagne, Italie…
« Les déclarations de certains leaders du mouvement local d’extrême gauche – comme Andreas Beuth, avocat et pilier de la scène autonome autour du Rote Flora – ont renforcé le malaise. Andreas Beuth a visiblement du mal à se positionner face à l’explosion de violence des dernières nuits. « Ils auraient dû s’attaquer aux quartiers des riches, à Blankenese ou Pöseldorf. Ici, on a du mal à comprendre qu’ils s’en soient pris à leur propre quartier, à leurs magasins, là où nous, les autonomes, nous vivons et faisons nos courses. ». » [Le Temps, Allemagne, Nathalie Versieux, Après le G20, Hambourg a la gueule de bois, 9-10 juillet 2017.]
Par ailleurs, il n’est qu’à regarder les comptes rendus de France Diplomatie pour comprendre à quel point la France a mené, durant ces six années écoulées, un travail de sape des structures politiques et économiques de la Syrie.
Les dirigeants qui se succèdent à la tête de l’ancien pays colonisateur (Sarkozy–Hollande–Macron) n’en finissent pas de ressasser ce qui est devenu chez eux “une obsession” et de réclamer « une transition politique », c’est-à-dire un changement de régime et de président, comme si la France avait encore droit de regard colonial sur la politique intérieure de la Syrie. Voici ce qui est dit à propos de la position d’Emmanuel Macron :
« La France continuera d’apporter son appui à la délégation du Haut comité des négociations dans le cadre des négociations, comme l’a rappelé le président de la République à l’occasion de son entretien téléphonique avec son chef, M. Riyad Hijab, le 6 juillet. » [France Diplomatie, Reprise des négociations entre l’opposition et le régime syrien à Genève (10 juillet 2017).]
Cette France, qui s’est mise elle-même à genoux, depuis des décennies, sur le plan politico-économico-social, a contribué et contribue, au premier chef, aux souffrances sans nom du peuple syrien comme à celles du peuple libyen.
L’arrivée de Donald Trump à la présidence des États-Unis aura au moins cela de positif : une sorte de désengagement, sur le plan diplomatique, dans la crise syrienne. Pourvu que ce petit pas en retrait devienne un grand pas…
Suite : IV. 80 – Les troupes de l’ÉI (État Islamique) repoussées vers les confins du Désert…
Françoise Petitdemange
29 septembre 2017