IV. 69 – Président Bachar Al Assad :
un homme de parole, loin de la logorrhée occidentale
3ème partie
Dans la suite de l’entretien accordé à un journaliste de l’AFP, le 13 avril 2017, le président Bachar Al Assad devait évoquer, après la présumée attaque chimique menée, le 4 avril, à Khan Cheikhoun, attribuée sans preuve à l’armée syrienne, et après les frappes aériennes états-uniennes effectuées contre la base militaire de Al-Sharayt… le 7, en signe de représailles, son souci de libérer la Syrie du mensonge occidental. [SANA, L’Agence Arabe Syrienne d’Informations, Le président al-Assad : « Nous ne possédons pas d’armes chimiques et nous avons renoncé à tout notre arsenal », 14 avril 2017. Note de l’Auteuse : Quelques termes modifiés ou ajoutés sont en écriture romaine (non italique) ; la ponctuation n’a guère été changée ; les indications entre crochets sont de mon fait. La vidéo s’arrêtant après la 18ème question, plutôt que de choisir des images hors contexte, les images de 19 à 25 sont reprises à partir des débuts de la vidéo, sans le texte en arabe (qui ne correspond pas à la suite de l’entretien), accompagnées cependant d’une légende munie d’un astérisque (*) (parce qu’elle ne correspond pas à l’image).]
La 14ème question est apparemment naïve. Sans doute le journaliste veut-il épuiser le stock d’arguments sans preuve que certain(e)s de ses “confrères” ou de ses “consœurs” ne se priveraient pas d’utiliser, à un moment donné, contre le président Bachar Al Assad, contre le gouvernement et l’armée de la République Arabe Syrienne… À propos de la présumée attaque chimique à Khan Cheikhoun prétendument effectuée par l’armée syrienne…
« Si vous dites ne pas avoir donné l’ordre, est-il possible que des éléments dévoyés aient lancé cette attaque chimique depuis l’armée ? »
« L’armée syrienne est une armée régulière
et non pas de milices… »
…le Président Bachar Al Assad ne recule devant aucune réponse à apporter à une question, si modeste paraisse-t-elle :
« Premièrement, même s’il y a un élément incontrôlé, l’armée ne possède pas de matières chimiques. Deuxièmement, un élément dévoyé ne peut pas envoyer un avion de son propre chef, même s’il le veut. C’est un avion et non pas un petit véhicule ni une mitrailleuse. Ce serait possible si on parlait d’un pistolet que quelqu’un manipule à sa guise et utilise pour violer la loi, chose qui peut arriver partout dans le monde, mais c’est impossible lorsqu’il s’agit d’un avion. Et troisièmement, l’armée syrienne est une armée régulière et non pas de milices. Elle est structurée et hiérarchisée, avec des mécanismes très clairs pour donner des ordres. Il n’est donc jamais arrivé, durant les six dernières années de guerre en Syrie, qu’un élément rebelle ait tenté d’agir contre la volonté de ses supérieurs. »
15ème question :
« Les Russes vous ont-ils mis en garde avant la frappe américaine ? Étaient-ils présents à la base aérienne ? »
Cette question est importante car les États-Uniens ne se gênent pas pour effectuer des frappes aériennes meurtrières tout en disant que les uns (les Syriens) étaient prévenus par les autres (les Russes) puisque eux-mêmes avaient prévenu les Russes… Ce qui renvoie la responsabilité des morts… non sur ceux qui agressent mais sur ceux qui étaient prétendument prévenus et qui devaient prévenir les futurs agressés…
« Les américains les avaient avertis
quelques minutes seulement avant l’attaque,
ou comme certains le disent “après l’attaque”. »
Le Président Bachar Al Assad sait donc à quoi s’en tenir quant à la responsabilité ou, plutôt, à l’irresponsabilité de la coalition occidentale menée par les États-Unis :
« Non, ils [les Russes] ne nous ont pas avertis parce qu’ils n’en ont pas eu le temps. Les américains les avaient avertis quelques minutes seulement avant l’attaque, ou comme certains le disent “après l’attaque”. Les missiles mettent quelque temps pour arriver jusqu’à la base [qui était la cible]. Mais, en fait, nous disposions de quelques indices, et nous avons pris certaines mesures. »
Ainsi, le président Bachar Al Assad peut dénoncer (dans le sens de faire savoir publiquement) ce procédé parmi d’autres utilisés par les États-Uniens pour tenter de semer la discorde entre les Russes, les Syriens, les Iraniens, le Hezbollah libanais… qui combattent – faut-il le rappeler ? – des groupes que les États-Uniens eux-mêmes et leur coalition qualifient de « terroristes » tout en leur donnant des armes.
16ème question :
« Est-ce que vous confirmez que 20 % de votre force aérienne a été détruite dans cette attaque, comme le disent les Américains ? »
« Non, en fait, comme les Russes l’ont déclaré,
quelques vieux appareils ont été détruits… »
Le Président Bachar Al Assad :
« Je ne connais pas le cadre référentiel de ces 20 %. C’est quoi les 100 % pour eux ? Est-ce que ça correspond au nombre des appareils ? Ou à la qualité ? Ce taux renvoie-t-il aux appareils opérationnels ou stockés ? Je ne sais pas ce qu’ils veulent dire par là. Non, en fait, comme les Russes l’ont déclaré, quelques vieux appareils ont été détruits, dont certains n’étaient pas opérationnels de toute manière. C’est la vérité. La preuve est que, depuis cette attaque, nous n’avons pas arrêté d’attaquer les terroristes partout en Syrie. Nous n’avons pas eu l’impression d’avoir été réellement affectés par cette frappe. »
Voici qui ne peut que décevoir les Tartarin(s) revanchards qui espèrent toujours pouvoir tout démolir et qui n’hésitent pas à se vanter des performances meurtrières et destructrices de leurs jouets de mort.
À partir de cette 17ème question…
« Votre gouvernement a déclaré au début que vous aviez frappé un dépôt d’armes chimiques. Est-ce vrai ? »
« À 4h du matin, ils ont annoncé
qu’il y aurait une attaque chimique et qu’il fallait s’y préparer.
Comment l’ont-ils su ? »
…le Président Bachar Al Assad, qui est bien placé pour savoir à quel point les groupes d’opposition syriens et les groupes issus d’Al-Qaïda, armés par les puissances occidentalo-golfico-sionistes, sont difficilement contrôlables, formule différentes hypothèses dont celle reprise du gouvernement syrien par le journaliste :
« C’est une possibilité parmi d’autres car, lorsque vous attaquez une cible des terroristes, vous ignorez ce qu’il y a, vous savez que c’est une cible : ça peut être une réserve, ça peut être un entrepôt, ça peut être un dépôt, ça peut être un camp, ça peut être un siège [une base], vous n’en savez rien. Mais vous savez que les terroristes l’utilisent, alors vous l’attaquez, comme toute autre cible. C’est ce que nous faisons quotidiennement et, parfois au fil des heures, depuis le début de la guerre. Mais vous ne pouvez pas savoir ce qu’il y a dedans.
Que les frappes aériennes aient visé un dépôt d’armes chimiques était donc une possibilité parmi d’autres. Mais encore une fois, cela ne correspond pas au “timing” de l’annonce, non seulement parce que les terroristes seuls l’ont annoncé le matin, mais aussi parce que leurs organes d’information, et leurs pages sur Twitter et sur Internet, ont annoncé l’attaque quelques heures avant l’attaque présumée, c’est-à-dire à 4h du matin. À 4h du matin, ils ont annoncé qu’il y aurait une attaque chimique et qu’il fallait s’y préparer. Comment l’ont-ils su ? »
18ème question :
« Ne pensez-vous pas que Khan Cheikhoun représente un revers pour vous ? Pour la première fois, depuis six ans, les États-Unis attaquent votre armée. Hier, après une courte lune de miel, Tillerson a dit que le règne de la famille Al Assad va bientôt prendre fin. Ne pensez-vous pas que Khan Cheikhoun constitue pour vous un grand revers ? »
Rex Tillerson, dont il est question ici, a été le PDG (Président-Directeur Général) de la société pétrolière et gazière texane, ExxonMobil, de 2006 à 2016, dont le chiffre d’affaires, en 2015, a été supérieur au PIB (Produit Intérieur Brut) de 166 États sur 193 États membres de l’ONU. Business is business (les affaires sont les affaires)… cette société espérant investir en Russie, Rex Tillerson s’était élevé contre les sanctions économiques qui menaçaient ce pays. Au moment où il s’exprime contre « la famille Al Assad », il vient de succéder, depuis le 1er février 2017, à John Kerry à la fonction de secrétaire d’État des États-Unis dans l’administration du président Donald Trump.
« Il ne s’agit en aucun cas, en Syrie, d’un règne
pour la famille Al Assad.
Il rêve… Ou disons qu’il divague. »
Le Président Bachar Al Assad :
« Il ne s’agit en aucun cas, en Syrie, d’un règne pour la famille Al Assad. [Ici, le président et le journaliste rient de la stupidité de Tillerson.] Il rêve. Ou disons qu’il divague. Nous ne perdons pas notre temps avec sa déclaration.
En fait, les États-Unis ont été, durant les six dernières années, profondément impliqués dans le soutien des terroristes partout en Syrie, y compris de « Daech » et d’« Al-Nosra », ainsi que de toutes les factions qui partagent la même idéologie en Syrie. C’est une chose claire et prouvée.
Mais si vous voulez parler des attaques directes, il y a quelques mois, une attaque, plus grave que cette dernière, a eu lieu, et ce, bien avant qu’Obama eût quitté ses fonctions. Je pense que cela a eu lieu à Deir Ez-Zor à l’Est de la Syrie, lorsqu’ils ont attaqué la montagne qui revêt une grande importance stratégique. Ils ont attaqué une base de l’armée syrienne régulière. Si l’armée syrienne n’avait pas été à ce moment-là assez forte pour repousser l’attaque de « Daech », la ville de Deir Ez-Zor serait tombée, et Deir Ez-Zor serait alors liée avec Mossoul en Irak. Cela aurait constitué une victoire très stratégique pour « Daech ».
Le gouvernement américain y était donc directement impliqué. Mais pourquoi ont-ils eu recours cette fois-ci à l’attaque directe ? Parce que, comme je viens de le dire, les terroristes dans cette région étaient en pleine débâcle. Les États-Unis n’avaient donc aucun autre choix sauf celui de soutenir leurs agents, à savoir les terroristes, et ce en attaquant directement l’armée syrienne. Ils leur avaient fourni toutes sortes d’armes, mais ça n’avait pas réussi. »
Les groupes armés de l’ÉI (État Islamique) qui ont mené différentes attaques, entre le 1er et le 8 décembre 2014, dont l’attaque de la montagne de Deir Ez-Zor qui est évoquée ici par le président Bachar Al Assad, et qui a eu lieu précisément le 5 décembre 2014, visaient à s’emparer de l’aéroport stratégique de Deir Ez-Zor utilisé par l’armée syrienne non seulement pour la défense de l’Est de la Syrie mais aussi pour le ravitaillement alimentaire.
Pour revenir à ce que dit le président Bachar Al Assad à propos de Rex Tillerson… « Il rêve. Ou disons qu’il divague. Nous ne perdons pas notre temps avec sa déclaration. » Cette expression « il divague » convient parfaitement pour qualifier la phrase de Tillerson mais aussi la parole de la plupart des dirigeant(e)s du monde occidental. Alors, avec “la fin du règne du clan ou de la famille Assad”, ils-elles se disqualifient eux(elles)-mêmes.
En 2011, les journalistes en France, qui auraient dû s’informer sur l’histoire de la Libye avant de s’adresser à des millions de personnes, ne parlaient-ils(elles) pas de… « La fin du règne de Kadhafi » « Kadhafi, retour sur la fin d’un règne », « La mort de Kadhafi marque la fin de la guerre en Libye », « Les 42 ans de règne de Kadhafi », « Kadhafi, 42 ans d’un règne sans partage », « Libye : fin de règne du clan Kadhafi dans la confusion », « Fin de règne dans un égout pour Kadhafi » ?… Des titres mais aussi des ragots, des élucubrations, des mensonges qui ont contribué à semer la confusion dans les esprits ignorants ou ramollis, à jeter de l’huile sur le feu de la guerre et à aboutir à la mort d’un homme photographiée, vidéotée en direct : autant d’images qui ont plongé le monde occidental – et la France en tête – dans les égouts de l’histoire de l’humanité.
19ème question : le journaliste revient sur la dernière partie de sa question précédente…
« Vous ne pensez donc pas que ce soit un revers pour vous ? »
« Cela fait partie du même contexte
qui dure depuis six ans… » *
Le Président Bachar Al Assad, de répondre…
« Non. Cela fait partie du même contexte qui dure depuis six ans, et qui a pris de multiples formes, alors que la politique américaine et occidentale vis-à-vis de la Syrie n’a nullement changé au fond. Laissons de côté les déclarations : certaines sont faites sur un ton élevé, d’autres d’une voix moins forte, mais la politique reste la même. »
Aucune illusion à se faire sur la politique occidentale, menée par les États-Unis contre la Syrie mais aussi, il est possible de l’écrire, contre tous les autres pays du monde… Les peuples européens ont pâti de « Deutschland über Alles » ; les peuples du monde pâtissent de l’« America first » qui ne date pas de la présidence de Donald Trump…
Suite : IV. 70 – Président Bachar Al Assad : un homme responsable
Françoise Petitdemange
10 juillet 2017
A reblogué ceci sur Histoire militaire du Moyen-Orient.
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