Certes, le jeu en vaudrait la chandelle, semble nous dire le Livre blanc :
« L’Asie est d’ores et déjà la partie du monde la plus dynamique, où la croissance est la plus forte, la population la plus nombreuse, et les mutations les plus impressionnantes. » (page 35)
Et le terrain paraît y être déjà un peu miné :
« C’est aussi une région qui comprend de nombreux conflits non résolus (Cachemire, péninsule coréenne, question de Taiwan), des tensions interétatiques (Inde–Pakistan, Inde–Chine, Chine–Japon), et où trois des principaux pays du monde ont des intérêts stratégiques et une présence militaire (Russie, Chine, Etats-Unis). » (page 35)
Mais ni l’Europe, ni la France, à moins que par solidarité otanisée avec les Etats-Unis et le Japon.
Ainsi la Chine, c’est loin. Mais, surtout, c’est peut-être un peu cher pour le camp occidental :
« Dans ce contexte, la forte augmentation de l’effort militaire, notamment en Chine (avec des taux annoncés pour le budget de 10 % par an en moyenne de 1989 à 2007, et de 17 % pour les deux années 2007 et 2008), est un élément de préoccupation d’autant plus sérieux que les données de cet effort manquent de transparence s’agissant de la Chine, que la région ne connaît aucun système de sécurité collective et que les mesures de confiance entre Etats y sont limitées. » (page 35)
Par ailleurs, le Livre blanc ne peut pas perdre de vue que, à l’opposé de ce que certains ont osé affirmer au lendemain de la chute du mur de Berlin, la fin de l’Histoire est loin d’être atteinte :
« Contrairement aux espoirs nés de la fin de la guerre froide, les logiques de puissance n’ont pas régressé. » (page 37)
De quelle puissance, en particulier ? Eh bien oui, toujours la même :
« Ainsi la Russie cherche-t-elle à conforter son retour sur la scène internationale et son statut de puissance majeure, avec un discours offensif à l’égard de certains pays européens, notamment dans son voisinage. Elle semble éprouver une certaine difficulté à prendre en compte les évolutions politiques intervenues depuis la fin du pacte de Varsovie et à assumer la plénitude du processus démocratique engagé dans les années 1990. Elle est tentée de tester les effets d’une pression, au moins économique, sur ses voisins. »
Mais il y a plus grave, si possible, puisque les rétivités convergentes de ces deux puissances maléfiques – Chine et Russie – font tort au champion toutes catégories de l’Occident impérialiste. Le Livre blanc en convient à regret :
« La volonté de la Russie de réaffirmer sa place et l’essor de la Chine dans tous les domaines pourraient conduire à relativiser la place de l’Amérique. Une des conséquences possibles de cette situation est une crise de confiance des alliés des Etats-Unis dans les deux régions les plus volatiles : le Moyen-Orient et l’Extrême-Orient. » (page 36)
Le Livre blanc est tellement meurtri qu’il en vient à confondre l’Amérique et les Etats-Unis. Mais il est bien vrai que si le Moyen-Orient et l’Extrême-Orient se décidaient à faire un bras d’honneur à l’impérialisme américain, il ne faudrait donner très cher ni de la puissance de l’Europe ni de celle de la France aussi tigresse soit-elle quand elle croit chasser sous l’aile de l’OTAN.
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Michel J. Cuny