Bien décidée à ne s’en laisser conter ni par la Russie ni par la Chine, Ursula von der Leyen pouvait annoncer, dès son discours d’ « intronisation » du 16 septembre 2020, qu’à titre personnel tout autant qu’en sa qualité de figure de proue de l’Europe, elle s’était déjà embarquée bien au-delà de la mer Méditerranée…
« Lorsque j’ai pris mes fonctions, ma toute première visite à l’extérieur de l’Union européenne a été pour l’Union africaine, et ce choix s’est imposé tout naturellement. »
Mieux :
« Trois mois plus tard, lors d’une nouvelle visite avec l’ensemble du Collège, nous avons établi nos priorités pour notre nouvelle stratégie avec l’Afrique. »
Ainsi, les citoyennes et citoyens européen(ne)s se trouvent dès maintenant attelé(e)s à un char qui va bon train… sous la bannière d’un « nous » dont nous savons qu’il rassemble les « investisseurs »…
« L’Afrique sera un partenaire essentiel pour bâtir le monde dans lequel nous voulons vivre – tant en ce qui concerne les questions liées au climat que le numérique ou le commerce. »
Sans doute, sous la pression irrésistible du « climat, du numérique et du commerce », le continent africain constituera-t-il un jalon « essentiel » dans la marche de l’Europe allemande vers la construction du « monde dans lequel » l’économie européenne conquérante trouvera agréable de vivre…
En effet, assure Ursula von der Leyen :
« Nous continuerons à croire en des relations commerciales ouvertes et équitables à travers le monde. »
« Ouvertes et équitables »… sans doute, mais gare à qui ne comprendrait pas, en Afrique ou ailleurs, que cela ne constitue pas une… fin en soi ! Et la présidente de la Commission européenne de l’affirmer aussitôt avec force…
« Non comme une fin en soi… » Joli affichage… de même sans doute que la face si agréable du « climat, du numérique ou du commerce »… « mais comme un moyen d’apporter la prospérité à nos pays et de promouvoir nos valeurs et nos normes ».
« Valeurs et normes » dont nous savons – sans encore y être allé(e)s voir pour l’instant – que, dans la dimension économique et sociale, elles devront être celles de « l’économie sociale de marché », avec son aptitude toute particulière à mettre en œuvre le travail humain dans un cadre dûment établi… Et c’est bien ce que sous-entend, ici même, Ursula von der Leyen :
« Plus de 600 000 emplois en Europe sont étroitement liés aux échanges commerciaux avec le Japon. Et l’accord que nous avons récemment conclu avec le Viêt Nam a permis de garantir des droits historiques à des millions de travailleurs sur place. »
Il s’agit là du « paisible » commerce… Pour atteindre cet objectif…
« Nous ferons usage de notre puissance diplomatique et de notre influence économique pour négocier des accords qui font la différence – des accords prévoyant, par exemple, des zones maritimes protégées en Antarctique. »
Qui répondront – côté sourire – au souci du climat :
« Il s’agirait de l’un des plus grands actes de protection de l’environnement de l’histoire. »
« Climat » qui peut s’allier au gentil « numérique » et offrir, jusqu’à l’autre bout du monde, des démonstrations de force (morale ?) dont nous aurions tort de ne pas nous inquiéter dès maintenant :
« Nous constituerons des coalitions extrêmement ambitieuses sur des questions telles que l’éthique numérique ou la lutte contre la déforestation – et nous développerons des collaborations avec tous les partenaires partageant les mêmes idées – des démocraties asiatiques à l’Australie, l’Afrique, les Amériques et à tout autre pays souhaitant y adhérer. »
Tout cela devra donc se faire sous un affichage dont l’impératrice de l’Union européenne nous redonne le dessin…
« Nous œuvrerons à une mondialisation juste. Mais nous ne pouvons pas la considérer pour acquise. Nous devons mettre l’accent sur l’équité et sur l’égalité des conditions de concurrence. Et l’Europe ira de l’avant – seule ou avec des partenaires souhaitant se joindre à elle. »
Et gare à qui oserait se mettre en travers de sa route !
En effet, il s’agit de promouvoir « UNE NOUVELLE VITALITÉ POUR L’EUROPE ». C’est le cri que lance Ursula von der Leyen…
Et si nous jetions un œil sur… l’économie sociale de marché…
Michel J. Cuny
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