Savoir échouer avec bonne humeur…

Bien conscients des limites de leur intervention, MM. Even et Debré n’en font pas moins fond sur les multiples éléments, en forme de scandales, qui marquent la situation actuelle du médicament au milieu de l’exercice de la médecine, pour définir une nouvelle orientation à donner aux investissements relatifs à ce secteur.

Est-ce décidément pour aboutir à une amélioration réelle du système de soins? Ou bien s’agit-il, plus prosaïquement, d’inscrire cette spectaculaire protestation dans une stratégie économique qui ne serait, pour finir, qu’une façon de mettre les questions de santé au service de l’impérialisme mondialisé ?

La seconde option signifierait que, pour protéger les chances de développement d’un mastodonte comme Sanofi,  – dont, par ailleurs, l’Etat français a toujours été le meilleur défenseur et soutien -, il conviendrait de ne pas hésiter à retourner les scandales qui émaillent la pratique médicale dans ses rapports avec l’industrie pharmaceutique contre les concurrents français de l’instrument internationalisé dont Chris Viehbacher est devenu la figure emblématique. Ce qui serait, tout à la fois, une bonne façon de dédouaner Sanofi, et d’accabler le numéro 2, par exemple…

De ce point de vue, confiné à la sphère d’intervention de Servier, ledit scandale du Médiator est une extraordinaire massue entre les mains de Sanofi et de ses compagnons de route. Si les feux de l’actualité n’illuminent que la toute petite part qui dépend de la responsabilité propre de Servier, il est bien certain que tous les acteurs qui restent dans l’ombre sont comme s’ils n’avaient jamais agi…, et donc comme si, pour la suite, on voulait leur conserver toutes les chances d’agir encore et toujours dans le sens d’intérêts difficilement avouables : de façon identique, ou en ne faisant que repeindre les masques.

Or, comme je crois l’avoir démontré dans « Une santé aux mains du grand capital? – L’alerte du Médiator » [accessible ici], c’est toute la vie de la médecine dans ses rapports avec l’industrie du médicament, la Sécurité sociale, les Assurances complémentaires, l’Université et le pouvoir politique depuis le début des années soixante-dix, que permet de revisiter, et jusque dans le détail, la trajectoire suivie par le Médiator en tant qu’il n’était qu’un au milieu de la multitude qui va donc continuer à jouir, elle, d’une parfaite immunité… De cette immunité qui nous condamne, toutes et tous, à devoir pâtir, dans notre santé, dans notre bien-être et dans nos moyens matériels de vivre un quotidien parfois terriblement difficile, des errements de la recherche médicale et du système de soins dont elle est l’élément essentiel.

Mais, n’est-ce pas à l’Etat lui-même et à ses services spécialisés de mettre en avant le souci de la santé de nos concitoyens et concitoyennes ? Oh, naïveté d’un peuple qui tarde tellement à prendre sa place dans la dimension économique et politique!

Et c’est effectivement tout autre chose que nous chantent les professeurs Even et Debré (page 119) :
« L’Etat pourrait pourtant aider ceux qui auraient compris que le médicament est une compétition scientifique internationale et, d’aventure, décideraient de relever le challenge. Mais il doit pour cela intervenir en aidant seulement et sans pitié celles des quelques entreprises, qui, telle Sanofi, l’ont enfin compris depuis peu et tentent de s’engager dans de profonds changements de culture parce qu’elles n’ont pas le choix!« 

« Seulement » Sanofi, « et sans pitié!« 

Michel J. Cuny


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