Conseil de Sécurité de l’ONU, New York, 18 décembre 2015
IV. 31 – Le Conseil de sécurité de l’ONU,
18 décembre 2015 :
pipeau et re-pipeau
(Fin)
Où il est possible de voir l’ingérence du trio occidental (États-Unis, Grande-Bretagne, France) – via le Conseil de sécurité de l’ONU – dans les affaires intérieures d’un État…
« Ayant à l’esprit l’objectif consistant à réunir l’éventail le plus large possible d’éléments de l’opposition, choisis par les Syriens, afin qu’ils décident de ceux qui les représenteront dans les négociations et définissent leurs positions de sorte que le processus politique puisse commencer, prenant note des réunions qui se sont tenues à Moscou et au Caire et des autres initiatives allant dans le même sens, et notant en particulier l’utilité de la réunion qui s’est tenue à Riyad du 9 au 11 décembre 2015, dont l’issue a contribué à la préparation des négociations sur un règlement politique du conflit devant se tenir sous les auspices de l’ONU, conformément au Communiqué de Genève et aux Déclarations de Vienne, et attendant avec intérêt que l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie mène à bonne fin les démarches nécessaires à cette fin, » [[Nations Unies, Conseil de sécurité, S/RES/2254 (2015), Distr. Générale 18 décembre 2015. Résolution 2254 (2015), Adoptée par le Conseil de sécurité à sa 7558e séance, le 18 décembre 2015, page 2.]
Les « éléments de l’opposition » les plus en vue sont surtout ceux qui ne vivent plus en Syrie depuis des années, voire des décennies… Qui peut représenter qui « dans les négociations » sinon une minorité restée sur place qui a contribué, avec l’appui des forces occidentales politico-médiatico-militaires, à déstabiliser le pays ? Comment ces « éléments de l’opposition » pourraient-ils contribuer au règlement d’un conflit politique qu’ils ont provoqué jusqu’au déclenchement d’une guerre civile doublée d’une guerre coloniale ?…
Quant à « l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour la Syrie », le Suédois devenu Italien, Staffan de Mistura, qui est né en Suède d’une mère suédoise et d’un père italien appartenant à une famille noble de Croatie, est-il vraiment à même de régler les différentes questions, qui se trouvent derrière le conflit syrien, avec Jan Egeland, son conseiller norvégien ? Ces “diplomates” venus du Nord sont-ils en mesure de comprendre vraiment les problèmes arabes ? N’existe-t-il pas de diplomates arabes, imprégnés de l’histoire et de la culture syriennes, plus habilités à comprendre la situation, la place et le rôle de la Syrie dans la région ?
Le Conseil de sécurité…
« 1. Confirme à nouveau qu’il souscrit au Communiqué de Genève du 30 juin 2012, avalise les Déclarations de Vienne, ayant pour objet l’application intégrale du Communiqué de Genève, fondement d’une transition politique conduite et prise en main par les Syriens et visant à mettre fin au conflit syrien, et souligne que c’est au peuple syrien qu’il appartient de décider de l’avenir de la Syrie, » [Idem, page 2.]
Pourquoi donc toutes ces ingérences d’hommes occidentaux, et d’exilé(e)s syrien(ne)s de longue date, dans la politique syrienne et, d’une façon générale, dans la politique arabe si « c’est au peuple syrien qu’il appartient de décider de l’avenir de la Syrie » ? Cette Résolution 2254 dit tout et son contraire puisqu’elle fait fi du résultat de l’élection présidentielle de juin 2014 tout en affirmant que « c’est au peuple syrien qu’il appartient de décider de l’avenir de la Syrie ». Le « peuple syrien » a déjà décidé depuis un an et demi… mais, manifestement, certains représentants au Conseil de sécurité de l’ONU considèrent qu’il a mal décidé et veulent décider à sa place de ce qu’il convient de faire de la Syrie.
Alors que le peuple libyen n’avait rien demandé à la France, le président Nicolas Sarkozy n’avait-il pas déclaré, le 19 mars 2011, jour même où les bombardiers français s’abattaient sur la Libye… « L’avenir de la Libye appartient aux Libyens. Nous ne voulons pas décider à leur place. » (Cf. https://unefrancearefaire.com/2016/10/20/les-valeurs-occidentales-guerres-et-assassinats/) Six ans après la destruction des structures politiques et économiques de son pays et l’assassinat barbare de Muammar Gaddhafi qui ont mis fin à la Jamahiriya Arabe Libyenne Populaire Socialiste, le peuple libyen sait ce qu’il en est des déclarations occidentales et onusiennes en sa faveur…
En fait de protection, c’est bien une guerre qui a été menée, sept mois durant, contre lui, son armée et sa police, mais aussi contre des soldats qui étaient venus – conformément à la « Déclaration de Syrte (Libye), 4ème Sommet extraordinaire de l’OUA (Organisation de l’Unité Africaine), les 8 et 9 septembre 1999 » (Cf. L’ouvrage La Libye révolutionnaire dans le monde (1969-2011), Éditions Paroles Vives 2014, pages 371 à 375), conformément à l’« Acte constitutif de l’UA (Union Africaine), Lomé (Togo), du 10 au 12 juillet 2000 » (Idem, pages 380 à 382) – d’autres pays d’Afrique pour le secourir : ces soldats n’étaient en rien des mercenaires, contrairement à ce que les dirigeant(e)s politiques et les prétendu(e)s intellectuel(le)s ont répété honteusement ou/et ignoramment dans les médias en France. Par contre, les combattants armés, envoyés en masse par le Qatar pour envahir la Libye, n’étaient effectivement que des mercenaires à la solde des monarchies du Golfe (Arabie Saoudite, Qatar) et au service des trois pays occidentaux (États-Unis, Grande-Bretagne, France) qui manœuvraient au profit des sionistes.
Cette guerre impérialiste, en laissant la population à la fois martyrisée et privée de la pensée, de la parole et de l’action de son Guide révolutionnaire, n’avait d’autre but que de précipiter ce pays arabo-africain dans le chaos. Les revenants exilés, dévorés par leurs ambitions personnelles, n’avaient et n’ont aucune perspective d’avenir pour l’ensemble de la population libyenne et pour le pays : ils ont donné au monde et à jamais une bien triste idée d’eux-mêmes. In fine, le pouvoir de décision a été enlevé au peuple libyen pour être abandonné à des bandes armées rivales au milieu des décombres…
Bien que la Libye offre malgré elle, depuis six ans, l’exemple d’un pays dévasté et d’un peuple hagard ballotté entre des factions rivales animées par les ficelles que tirent les occidentaux, le Conseil de sécurité persiste dans les mêmes erreurs qui d’être flagrantes ne peuvent qu’être volontaires et signe pour une « transition politique » en Syrie comme en Libye avec la garantie d’un chaos assuré. Et donc, ce Conseil de sécurité…
« 2. Prie le Secrétaire général de réunir, en usant de ses bons offices ou de ceux de son Envoyé spécial pour la Syrie, les représentants du Gouvernement syrien et de l’opposition pour qu’ils engagent d’urgence des négociations officielles sur un processus de transition politique, en visant le début du mois de janvier 2016 pour le début des pourparlers, conformément au Communiqué de Genève et comme indiqué dans la Déclaration du Groupe international d’appui à la Syrie du 14 novembre 2015, en vue d’un règlement politique durable de la crise, » [Idem, page 2.]
Si ce n’est pas de l’ingérence de pays étrangers dans les affaires intérieures d’un pays souverain, alors, qu’est-ce ? Le peuple syrien, s’est-il prononcé, une seule fois, en faveur d’une « transition politique » ? Non, puisqu’il a réélu Bachar El Assad à la présidence de son pays.
Le Conseil de sécurité reprend donc la Déclaration du GIAS (Groupe International d’Appui à la Syrie) constitué, en majorité, de pays occidentaux ou pro-occidentaux, puisqu’il…
« 4. Appuie, à cet égard, un processus politique dirigé par les Syriens et facilité par l’Organisation des Nations Unies, qui mette en place, dans les six mois, une gouvernance crédible, inclusive et non sectaire, et arrête un calendrier et des modalités pour l’élaboration d’une nouvelle constitution et se dit favorable à la tenue, dans les 18 mois, d’élections libres et régulières, conformément à la nouvelle constitution, qui seraient conduites sous la supervision de l’ONU, à la satisfaction de la gouvernance et conformément aux normes internationales les plus élevées en matière de transparence et de responsabilité, et auxquelles pourraient participer tous les Syriens, y compris de la diaspora, qui en ont le droit, comme prévu dans la Déclaration du Groupe international d’appui à la Syrie du 14 novembre 2015, » [Idem, page 3.]
Le peuple syrien ? Avant même la fin de la guerre, tout lui est imposé pour qu’il choisisse… Une « nouvelle constitution », des « élections libres et régulières » [sic], « à la satisfaction de la gouvernance » définie par qui ?, « conformément aux normes internationales » qui ne peuvent qu’être occidentales. Quant à « la diaspora », qu’elle soit libyenne, syrienne ou autre, elle est constituée d’opposant(e)s émigré(e)s qui, dans les “nouveaux” pays où ils-elles vivent depuis des mois, des années et même des décennies, gardent une double nationalité (américano-libyenne, franco-syrienne, etc.) qui leur donne l’illusion de pouvoir jouer leur pays d’accueil contre leur pays natal pour prendre le pouvoir dans celui-ci alors qu’ils-elles ne sont, sans le savoir, que les jouets de plus forts qu’eux-elles.
Le Conseil de sécurité, d’être constitué de 5 pays (3 occidentaux, 1 eurasien, 1 asiatique) sur plus de 200 que compte le monde, ne peut guère être contesté dans ses décisions, y compris lorsqu’elles concernent le monde arabe. Le voici qui…
« 13. Exige de toutes les parties qu’elles mettent immédiatement fin à toutes attaques contre les populations ou les biens civils, y compris celles dirigées contre les installations et le personnel médicaux, ainsi qu’à l’emploi aveugle d’armes, tels que les tirs d’obus et les bombardements aériens, se félicite que le Groupe international d’appui pour la Syrie se soit engagé à faire pression sur les parties à cet égard, et exige en outre de toutes les parties qu’elles s’acquittent immédiatement des obligations que leur impose le droit international, y compris le droit international humanitaire et le droit des droits de l’homme applicables, » [Idem, page 4.]
Comment le Conseil de sécurité, peut-il faire accroire à qui que ce soit que l’Armée de la République Arabe Syrienne et les groupes armés qui la secondent auraient un intérêt quelconque à mener des « attaques contre les populations ou les biens civils » ? à détruire volontairement « les installations et le personnel médicaux » ? Les combattants de l’Armée syrienne dite libre et de l’État Islamique eux-mêmes, auraient-ils intérêt à détruire volontairement ce dont ils pourraient avoir besoin à un moment ou un autre des combats ? Le Conseil de sécurité, ne sait-il pas que les combattants ne jouent pas à colin-maillard et que « l’emploi aveugle d’armes » n’est pas leur jeu favori ? Ne sait-il pas que les combattants ne tirent pas leur poudre aux moineaux et qu’une armée digne de ce nom n’utilise pas « les tirs d’obus » et « les bombardements aériens » pour s’amuser ? Ils ne jouent pas à la guerre. Ils font la guerre.
Pendant que les Syrien(ne)s et les combattants des forces armées luttent pour libérer la Syrie, des membres du GIAS multiplient les rencontres, une fois ici, une fois là, une fois à Genève (30 juin 2012), une fois à Vienne (14 novembre 2015)… Mais les petites têtes d’occidentaux repus provoquent des guerres qui ne parviennent plus, depuis la seconde guerre mondiale, jusque dans leur pays menacer leurs fauteuils de présidents ou de ministres, leurs hôtels particuliers ou leurs villas, leurs familles ou leurs amis… Ainsi, ils ne cessent d’évoquer le « droit international » qui n’est, en réalité, que le droit occidental, et peuvent, sans la moindre gêne, lancer des guerres partout dans le monde pour y imposer leurs “valeurs démocratiques” (comme en Libye) et donner des leçons de morale aux populations et aux dirigeants des pays qu’ils ordonnent de détruire, en brandissant les « droits de l’homme » qu’ils ne respectent même pas eux-mêmes…
La « démocratie » et les « droits de l’homme » ne sont que des mots porteurs de haine, de violence, de bombes, qui se traduisent dans la réalité par des vies défaites. Le Conseil de sécurité ne peut ignorer tout cela, lui qui…
« 14. Souligne qu’il importe au plus haut point de créer des conditions permettant aux réfugiés et aux personnes déplacées de retourner de leur plein gré et en toute sécurité dans leur région d’origine et aux régions touchées de se relever, conformément au droit international, notamment aux dispositions de la Convention et du Protocole relatifs au statut des réfugiés, et en tenant compte des intérêts des pays qui accueillent des réfugiés, exhorte les États Membres à prêter leur concours à cette fin, attend avec intérêt la Conférence de Londres sur la Syrie, qui sera organisée en février 2016 par le Royaume-Uni, l’Allemagne, le Koweït, la Norvège et l’Organisation des Nations Unies et qui devrait apporter une contribution importante dans ce contexte, et exprime également son soutien au relèvement et à la reconstruction de la Syrie après le conflit, » [Idem, page 4.]
Une fois les infrastructures et les superstructures de leur pays détruites, il est bien difficile pour les « personnes déplacées de retourner de leur plein gré et en toute sécurité dans leur région d’origine ». Le traumatisme est à vie ! Or, les hommes et les femmes bien à l’abri derrière leurs décisions ne savent pas ce que ce mot veut dire, jour après jour, nuit après nuit. Quant à permettre « aux régions touchées de se relever, conformément au droit international », le peuple irakien en sait quelque chose… lui qui, non encore relevé d’une première guerre, doit, depuis des décennies, faire face à une série d’autres… Il serait plus bénéfique pour l’ensemble des humains que le « droit international » sanctionnât durement tout pays qui en attaque un autre, directement ou par pays ou par organisation interposé(e)s comme l’OTAN.
Les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France sont les puissances les plus dangereuses qui soient. Fanatiques du capitalisme qu’il leur faut protéger à coups de mensonges, de vols de matières premières, d’extension de marchés et de bombes, elles testent leurs nouveaux jouets ou bazardent les anciens… pour le plus grand profit des multinationales de l’armement. Mais lorsqu’il s’agit d’accueillir les réfugié(e)s que leurs guerres ont chassé(e)s de leurs pays sous les bombes, elles sont aux abonné(e)s absent(e)s. Elles laissent le soin d’accueillir ces réfugié(e)s à d’autres pays qui, pour la majorité d’entre eux, n’ont ni poussé à la déstabilisation, ni poussé à la guerre.
Les trois puissances capitalistes-impérialistes-colonialistes (États-Unis, Grande-Bretagne, France) sont destructrices du genre humain.
Suite : IV. 32 – La disparition de Bachar El Assad ne peut mettre fin au conflit. Tout au contraire…
Françoise Petitdemange
15 mars 2017