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Destruction des tribus millénaires et traite occidentale
De l’autre côté de ce qui s’appelait alors la Mer Océane et qui deviendra, par la suite, l’Océan Atlantique, le Génois Christophorus Columbus (ou Christophe Colomb) (1451-1506), qui, en dépit de la légende, n’a pas été le premier européen à mettre le pied sur le sol dit du Nouveau Monde, apercevait, en 1492, une île que les tribus autochtones appelaient Guanahani, qu’il s’appropria au nom de la Couronne de Castille et rebaptisa, dès le lendemain, San Salvador. Lui et son frère, Bartholmeo, ont inauguré un chemin de sang que les navigateurs, explorateurs, conquérants laisseront derrière eux sur les territoires fréquentés. Christophe Colomb mourra en ayant ignoré l’existence des territoires devenus Amérique du Nord, et en croyant avoir atteint les Indes. Mais les premiers pas des Européens sur les territoires où vivaient, depuis des millénaires, de nombreuses tribus venues d’Asie, seront, pour celles-ci, le début de la fin.
Les petit(e)s Blanc(he)s (déclassé(e)s, proxénètes, prostituées, chômeurs, et autres indésirables), déporté(e)s souvent de force de l’autre côté de l’Atlantique pour peupler les colonies, n’étaient guère porté(e)s à donner leur force de travail dans les plantations ou les mines. Le travail forcé, les maladies importées d’Europe, les massacres allaient bientôt décimer les tribus millénaires : les colons européens, signant des traités de paix avec les chefs, reniaient aussitôt leurs signatures et chassaient les autochtones vers les terres infertiles. Ainsi devenus, par usurpation, propriétaires des immenses territoires, ces colons n’avaient obtenu, avec leur violence et leurs coupes sombres, que la destruction de la main-d’œuvre ; ils se verraient bientôt contraints de chercher une autre main-d’œuvre ailleurs et instaureraient, avec les États européens et les armateurs portugais, français, anglais, hollandais des navires marchands, un gigantesque trafic d’êtres humains.
Colonies et possessions :
françaises, portugaises, anglaises, néerlandaises, espagnoles, « 13 colonies »
Les navires marchands européens quittaient les côtes occidentales de l’Europe chargés de denrées parmi lesquelles des toiles, appelées “indiennes” ou “guinées”, destinées aux dames africaines, et des fusils pour les hommes. Puis ils descendaient le long des côtes de l’Afrique de l’Ouest pour échanger, dans les comptoirs, leurs denrées contre des hommes, des femmes et des enfants, qui avaient été arraché(e) lors de razzias dans leurs villages au cœur de l’Afrique, et acheminé(e)s, par des marches forcées, jusqu’à des camps de fortune, les barracoons, où ils-elles étaient cantonné(e)s.
À l’arrivée des navires, hommes, femmes, et enfants, enchaîné(e)s, remplaçant les diverses denrées (vins et spiritueux, produits manufacturés, armes…) étaient entassé(e) dans les cales pour une longue traversée de l’Océan Atlantique : ces Noir(e)s d’Afrique ne sortaient de ces cales que pour être vendu(e)s/acheté(e)s, comme esclaves, sur des marchés aux Amériques. Une fois vendu(e)s, ils-elles appartenaient, corps et âme, à leurs acheteurs, propriétaires européens de plantations de cannes à sucre, de cotonniers, de cacaotiers et de caféiers, ou propriétaires de fabriques de sucre, d’usines de torréfaction du cacao et du café. Une fois leurs cargaisons d’esclaves déchargées aux Amériques, les navires reprenaient les routes maritimes, les cales bourrées de nouveaux produits, en direction de l’Europe pour le plus grand plaisir de la riche société européenne consommatrice de produits exotiques.
Le commerce triangulaire
La déportation des premiers esclaves africains de Guinée vers les Antilles (Haïti) avait eu lieu en 1510. D’autres esclaves africains seraient débarqués au Brésil en 1534. Les navires naviguaient de l’Archipel de Sāo Tomé-et-Principe aux côtes du Congo, de l’Angola, du Ghana actuel. Au fil des siècles et de l’épuisement de l’Afrique en hommes, femmes, enfants, assez vigoureux pour travailler, les navires seraient amenés à mettre le cap de plus en plus au sud.
Au nord de l’Afrique, la lutte contre les corsaires permettait, aux Européens, de bannir la traite orientale au profit de la traite occidentale. La traite orientale déplaçait les Africain(e)s dans les pays voisins. La traite occidentale les déportait du continent africain au continent américain : razzias, marches forcées, déportation, achat/vente, mise en esclavage jusqu’à ce que mort s’ensuive… La traversée de l’immense océan, c’était, pour les Africain(e)s, un aller sans espoir de retour.
Françoise Petitdemange
6 novembre 2016
[Image à la une, cf. Georges Delobbe et ses collaborateurs, Esclavage et traites négrières, Imprimerie Moderne de l’Est et Pemf, 2005, page 2.]