France : tout est prêt pour la grande aventure militaire

Comme le Livre blanc de la défense et de la sécurité nationale de 2013 nous l’avait précédemment dit… si elle est essentielle pour les activités purement militaires…
« L’industrie de défense apporte également une contribution importante à l’économie française et se situe à un niveau d’excellence lui permettant de figurer parmi les leaders mondiaux, notamment à l’exportation. » (page 124)

Il y revient un peu plus bas.  S’agissant tout particulièrement de celles qui appartiennent au secteur de la défense :
« La France continuera d’accompagner les efforts d’exportation des entreprises. » (page 126)

Dans ce contexte où nous jouxtons l’économie générale du pays, les questions stratégiques et militaires peuvent interférer agréablement :
« Un effort doit notamment être engagé pour mettre en œuvre une politique de long terme de sécurisation des approvisionnements de la France et de l’Europe, en particulier dans le domaine des matériaux stratégiques. » (pages 129-130)

On le voit, il y a ici un souci de « développement durable »… Il s’agit d’obtenir une garantie de long terme sur l’approvisionnement en matériaux stratégiques, ce qui ne peut qu’intéresser, directement ou indirectement, toutes les entreprises qui les utilisent. Quant aux pays fournisseurs concernés, il devront être « durablement » soumis aux intérêts de leurs clients français ou européens, c’est-à-dire à une politique de long terme qui recevra les moyens nécessaires à ses ambitions de grande ampleur. Or…
« Au niveau national, celle-ci doit conduire à renforcer les relations entre l’État et les entreprises, afin de construire une vision partagée des risques et des solutions envisageables. » (page 130) 

Du point de vue militaire, comme du point de vue plus général de la géostratégie…
« Au niveau européen, il convient de renforcer la concertation entre États membres et de mettre en œuvre une politique européenne d’analyse des risques, de préservation des entreprises maîtrisant des techniques rares. » (page 130)

C’est au beau milieu de cet ensemble de visées terriblement conquérantes que la France doit trouver sa place qui ne peut être, semble-t-il, que la première.

La « conclusion récapitulative » affirme tout d’abord qu’elle devra se montrer rassembleuse :
« La France continuera à soutenir les initiatives européennes en matière de partage et de mutualisation de capacités militaires. » (page 134)

Ensuite, elle devra obtenir une montée en puissance de ses moyens et de son rôle, et se tenir prête à saisir les occasions qui se présenteront à elle, pour s’y projeter en qualité d’initiatrice, de chef de file et de leader dans l’action elle-même :
« L’évolution du contexte stratégique pourrait amener notre pays à devoir prendre l’initiative d’opérations, ou à assumer, plus souvent que par le passé, une part substantielle des responsabilités impliquées par la conduite de l’action militaire. » (page 136)

Ce qui exigera d’elle une amélioration sensible de ses éventuelles performances militaires de terrain :
« La France estime qu’elle contribuera d’autant mieux à une réponse collective qu’elle disposera des capacités d’initiative et d’action autonomes lui permettant aussi d’entraîner et de fédérer l’action de ses alliés et partenaires. » (page 136)

Or, il ne s’agit pas de pouvoir montrer des aptitudes certaines dans le seul domaine du déclenchement d’opérations comme cela s’est vu en Libye. Il s’agit de pouvoir prendre sous sa responsabilité des actions de grande ampleur, susceptibles de produire des effets durables. En d’autres termes, il ne s’agit pas de faire seulement face à telle ou telle manœuvre locale. Le mot « stratégique » se fait donc très insistant :
« La France fait dès lors du principe d’autonomie stratégique le fondement de sa stratégie en matière d’intervention extérieure. » (page 136)

Il ne faudrait donc pas s’y tromper, en raison  d’une sorte de timidité excessive. La France est partie pour de grandes choses, et elle s’en donnera les moyens :
« Elle disposera des capacités lui conférant une autonomie d’appréciation, de planification et de commandement, ainsi que des capacités critiques qui sont à la base de son autonomie de décision et d’action opérationnelles. » (page 136)

Entrons un peu dans les détails du champ que l’outil militaire français va devoir couvrir :
« Nos armées doivent pouvoir répondre à la diversité des menaces et des situations de crise. Elles devront pouvoir agir dans des opérations de coercition, dans lesquelles l’objectif de neutralisation de l’appareil politico-militaire adverse impose de disposer de forces de très haut niveau technologique ; elles devront également pouvoir s’engager dans des opérations de gestion de crise, qui viseront à restaurer les conditions d’une vie normale et nécessiteront le contrôle dans la durée de larges espaces physiques. » (page 136)

Nous sentons parfaitement le côté impérial de toute cette affaire…

D’ailleurs, peu à peu, une certaine exaltation s’empare manifestement des rédacteurs du Livre blanc. Elle rend compte sans doute de l’enthousiasme croissant de ses divers promoteurs :
« Pour garantir sa capacité de réaction autonome aux crises, la France disposera en permanence d’un échelon national d’urgence de 5 000 hommes en alerte, permettant de constituer une force interarmées de réaction immédiate (FIRI) de 2 300 hommes, projetable à 3 000 km de l’hexagone, dans un délai de 7 jours. » (page 136)

 Nous ne voyons pas tout de suite les dégâts que ce genre d’instrument peut engendrer, mais nous faisons confiance à nos états-majors…

Et nous nous laissons emporter par une exaltation qui leur vient sans doute de loin (Algérie 1954-1962). C’est leur revanche pleine et entière qui s’annonce…
« La France pourra s’appuyer sur des déploiements navals permanents dans une à deux zones maritimes, sur la base des Émirats arabes unis et sur plusieurs implantations en Afrique, dont l’articulation sera adaptée, afin de disposer de capacités réactives et flexibles à même de s’accorder aux réalités et besoins à venir de ce continent et de notre sécurité. » (page 136)

Ainsi, tout est-il prêt, désormais…
« Sous préavis suffisant, après réarticulation de notre dispositif dans les opérations en cours, les armées devront être capables d’être engagées en coalition et pour une durée limitée, sur un théâtre d’engagement unique, dans une opération de coercition majeure, dont la France devra pouvoir assurer le commandement. » (page 137)

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Nos écrans plats attendent la suite avec un énorme appétit…

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Michel J. Cuny

 


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