Après avoir regardé de près les propos tenus les 13 et 18 janvier 2015 par Claude Bartolone, président de l’Assemblée nationale, après les attentats du début du mois à Paris, et constaté qu’ils étaient l’annonce d’une guerre qui serait faite sans relâche à l’islam sous couvert de l’être au djihadisme, nous pouvons voir ce qu’il en a été, au même moment, pour le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius.
Laurent Fabius
Nous le retrouvons le 13 janvier, intervenant au Sénat. Le président de la Haute Assemblée, Gérard Larcher ouvre la séance :
« L’ordre du jour appelle un débat suivi d’un vote sur la demande du Gouvernement d’autorisation de prolongation de l’intervention des forces armées en Irak, en application du troisième alinéa de l’article 35 de la Constitution. »
Le ministre des affaires étrangères et du développement international (du développement international, qu’est-ce à dire ?) signale aussitôt un concours de circonstances que tout un chacun a nécessairement à l’esprit :
« Par coïncidence, c’est le même jour que le Sénat est appelé à débattre des attaques terroristes et de notre intervention en Irak. »
Pourtant, bien sûr, l’intervention en Irak ne paraît pas avoir, tout d’abord, un lien de causalité avec les derniers événements. Le ministre en convient indirectement :
« Le 19 septembre dernier, le président de la République a décidé de faire intervenir nos forces armées en Irak, à la demande des autorités irakiennes, confrontées à l’organisation terroriste Daesh. »
Or, désormais, il est possible de jouer une nouvelle carte, plutôt inattendue au regard de la précédente demande si généreusement attribuée au gouvernement irakien. La France ne fait pas qu’intervenir à l’invitation de l’Irak. C’est Laurent Fabius qui l’affirme :
« Nous devions agir là-bas pour nous protéger ici. [M. Aymeri de Montesquiou approuve] C’est une illusion de penser qu’il y a des frontières, c’est une illusion de penser que c’est parce que nous sommes là-bas qu’il y a du terrorisme ici. C’est le contraire.«
C’est parce qu’il y a du terrorisme en France, que nous sommes en Irak… Le gouvernement irakien a donc décidément bien fait en nous invitant à intervenir chez lui : c’est tout juste ce qu’il nous fallait… Encore une coïncidence heureuse !
Ce qui est plus remarquable encore, c’est que nous ne sommes pas seuls à souffrir d’un terrorisme intérieur qui doit être battu en brèche par des opérations visant l’extérieur. Le ministre des Affaires étrangères – et du développement international – poursuit sa démonstration :
« L’offensive de Daesh a été stoppée, des territoires conquis ont été repris. Ces résultats, nous les devons à une large coalition réunissant plus de soixante nations, sous l’égide des États-Unis d’Amérique, dont une trentaine ont engagé des moyens militaires. »
Sous l’égide des États-Unis qui ont eux-mêmes tout fait depuis si longtemps pour que le chaos s’installe… à l’intérieur de l’Irak. Voici venir les pompiers qui ont eux-mêmes provoqué l’incendie. Et la France, qui avait décidé, au temps de Jacques Chirac président, de ne pas jouer avec ce genre d’allumettes, se précipite maintenant à la rescousse des semeurs de malheurs…
Or, tandis que la France est occupée, avec la soixantaine d’alliés occidentaux, à jouer les chevaliers du ciel :
« Aujourd’hui, nous déployons quinze avions Rafale et Mirage 2000, ainsi que des moyens de ravitaillement en vol, de détection et de renseignement«
…le bon peuple du cru et des environs fait joujou avec un matériel d’une tout autre allure et quelques bons conseils des… pompiers de service :
« Nous participons aussi à l’armement, au conseil et à la formation des combattants kurdes. Au total, une centaine de formateurs français seront sur place, un millier si l’on prend en compte les pays voisins.«
L’Irak !… Allons-donc… Qui croirait encore que la véritable raison de la présence de la France et de ses alliés ici puisse être de seulement venir tendre une main recourable au gouvernement irakien. Tous ces gens-là ont quelque chose de plus urgent à faire. Mais, bien sûr, la France, qui y est la plus intéressée en sa qualité d’ancienne puissance coloniale (souvenons-nous : De Gaulle en Syrie, 1941, 1943, 1945… http://reseauinternational.net/gaulle-hollande-en-syrie-meme-combat/) n’a pas à le clamer sur tous les toits, vu la concurrence. C’est pourquoi l’ami Laurent ne nous le dit qu’à mi-voix et par la négative :
« La France, comme le Royaume-Uni, a choisi de ne pas mener de frappes aériennes en Syrie. Nous soutenons en revanche l’opposition modérée. La situation à Kobané, à Alep, ne laisse personne indifférent. « Ni Bachar, ni Daesh » disait le Premier ministre : ce serait une illusion que de prétendre lutter contre Daesh en maintenant au pouvoir M. Bachar el-Assad. Je rappelle que c’est ce dernier qui a fait sortir les terroristes des prisons ! Ces deux factions se combattent mais s’épaulent aussi. »
Effectivement, c’est la peau de Bachar qu’il nous faut. Mais, comme lui-même s’entend avec les terroristes (c’est ce qui vient de nous être dit…), en frappant, depuis le ciel, sur eux qui le frappent sur terre tellement ils l’aiment, les Etats-Unis entrent peu à peu en Syrie, sans les Français, qui font un juste temps de pénitence… en Irak, sans perdre le fil pour autant.
Mais tout cela la France ne peut le faire entendre que très timidement :
« Il n’est pas question de se précipiter dans les bras de Bachar el-Assad, comme je l’entends dire. »
En effet, en tant qu’il est le fils de son père, et le représentant de cette Syrie qui ne veut pas repasser sous la botte des colonisateurs façon De Gaulle et tutti quanti, cet homme-là ne « mérite pas de vivre », n’est-ce pas, compère Fabius ?
Pourquoi cette France, tellement guerrière, revient-elle au galop ?…
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Michel J. Cuny