La cinquième rubrique des éminentes qualités prêtées par la Fondation Konrad Adenauer à l‘ « économie sociale de marché » concerne – tout simplement… « l’éthique ». Nous découvrons, sans trop en être étonné(e)s, qu’elle n’en manifeste justement aucune… s’il faut en rester à ceci qui représente le condensé de l’ensemble de cette systématisation d’une économie qui plonge ses racines jusque dans une lutte de classes d’autant plus féroce qu’elle doit rester totalement masquée en tant que telle…
« Tous ces éléments constituent l’économie sociale de marché qui peut être définie comme un système de valeurs qui se contrôlent et se conditionnent mutuellement répondant à des exigences éthiques très élevées tout en se contentant, au niveau individuel, d’une éthique minimale. Ce dernier aspect n’a rien de péjoratif puisqu’il est contraire à la dignité humaine de devoir « prétendre » constamment à des objectifs et des valeurs que même des saints ne sauraient respecter. » (Idem, page 15)
Cependant, et sans doute parce que « qui fait l’ange, fait la bête », il ne s’agit pas, pour les forts, de se voiler la face devant un avenir qui ne paraît pas devoir leur faire trop de cadeaux…
« Pour résoudre les problèmes auxquels l’Allemagne et l’Europe se voient confrontées – mondialisation croissante, démographie, changement climatique, rareté des ressources, migration, sans parler de la réorganisation des marchés financiers et de la crise de l’euro – il faut une base claire en termes de politique ordonnatrice. » (Idem, page 15)
S’il ne s’agit donc pas de pousser l’humain vers le haut de l’éthique, il faut se préparer à bien l’encadrer pour cette nouvelle aventure qui va dépasser le cadre strictement allemand, et ceci sans redouter d’y aller fermement…
« Le retour à une politique ordonnatrice basée sur les principes de l’économie sociale de marché et sa promotion en Europe s’imposent aujourd’hui plus que jamais, ce qui exige un certain courage et une forte détermination. » (Idem, page 15)
En tenant compte de l’attelage complet des différences qui couvrent l’univers des forts et des faibles par rapport au système général de la concurrence (c’est-à-dire de la démocratie au sens où l’intérêt des forts peut s’y faire valoir s’en qu’il y paraisse trop), et sans rien modifier de l’être humain en tant qu’il consent à jouer ce jeu-là, il ne va pas falloir louper la nouvelle étape qui s’offre sur une échelle élargie… En effet…
« A la différence de la période d’après-guerre pendant laquelle il s’agissait d’orchestrer et de structurer un nouveau départ, la politique ordonnatrice est aujourd’hui plus appelée à modifier des comportements institutionnalisés établis – dans un système en fonctionnement. Il s’agit d’une tâche très difficile qui doit prendre en compte des perspectives européennes et globales. » (Idem, page 15)
Au bas de cette même page, intervient cette petite formule destinée aux initié(e)s… même si elle pourra toujours faire réfléchir ceux et celles des autres qui auraient pu encore en douter…
« […] sans oublier le fait que l’économie sociale de marché visait, dès ses débuts, l’unification de l’Europe. » (Idem, page 15)
Ainsi équipé(e)s, voilà qu’enfin, nous allons pouvoir entrer dans le vif du sujet de la promotion, par l’utilisation d’un « argumentaire détaillé », de l’économie sociale de marché pour l’Europe entière… sous la conduite d’une Allemagne décidément souveraine en ce qu’elle y met au tout premier rang l’histoire économique – et politique – qui est désormais la sienne…et qui se décline comme un Décalogue dont voici le détail :
« 1. la propriété privée des moyens de production, la liberté d’exercer une activité industrielle ou commerciale, la liberté de choisir sa profession et la responsabilité liée à la propriété privée ;
2. la concurrence garant de liberté qui comprend le libre choix de ce que l’on veut consommer ;
3. un système monétaire stable et fonctionnel garantissant la stabilité des prix ;
4. un niveau d’emploi élevé ;
5. un équilibre commercial avec un taux d’exportation élevé ;
6. une croissance économique constante et raisonnable ;
7. une juste répartition des revenus ;
8. la possibilité de percevoir des revenus par la participation au capital de l’économie nationale (juste répartition du patrimoine) ;
9. les objectifs de politique environnementale ;
10. la relation entre l’économie sociale de marché et le processus d’unification européenne. » (Idem, page 16)
À quel prix – intérieur et extérieur – cela pourra-t-il se réaliser ? Nous ne pourrons le comprendre qu’en entrant dans le détail de chacun de ces éléments, tout en suivant, avec la plus grande attention, ce que leurs promoteurs veulent bien nous en dire.
Une chose est sûre : tout cela ne va pas rester endormi quelque part dans des cartons. Les auteurs offrent leurs arguments à toute personne qui, à travers « des publications, des séminaires, conférences et par la coopération avec des écoles, des universités, des entreprises et des institutions de formation continue » souhaiterait (nous sommes alors en 2013), se rallier au vœu exprimé par Angela Merkel (eux-mêmes nous le disent) de « faire de l’économie sociale de marché un « produit d’exportation de l’Allemagne ». » (Idem, pages 16-17)
… et donc dans le reste de l’Union européenne, tout d’abord.
Évidemment, à travers cette importante action de promotion, il ne faudra en rien heurter la diversité des intelligences et des savoirs… Bien au contraire, puisque c’est le point d’appui principal de la dynamique qu’il s’agit de mettre en œuvre en profitant des différences de… niveaux personnels et nationaux… européens, tout d’abord… Il faut donc le souligner avec force auprès de quiconque voudrait partir en mission sous la belle bannière de l’ancien miracle allemand…
« Il s’agit d’un travail permanent à reprendre sans cesse dont les contenus sont à adapter et la présentation à amender toujours à nouveau pour pouvoir adresser ce message à tous les tranches d’âge et à toutes les couches de la société quel que soit leur niveau d’instruction. » (Idem, page 17)
Michel J. Cuny
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