Assemblée Générale de l’ONU à New York
Discours de Donald Trump,
19 septembre 2017
Texte 3 :
« Un régime-voyou »,
selon le(s) président(s) des États-Unis…
3 – D. Trump, 2017 – « [N]ous n’aurons pas d’autre solution
que de détruire complètement… »
Le président Trump ne rompt pas avec l’idéologie de ses prédécesseurs à la Maison-Blanche : sur cette planète, il y a les États qui font le Bien (les États-Unis) et les États qui font le Mal (tous les autres). Mais, parmi ces derniers, il y a les derniers des derniers qui ne sont pas soumis aux États-Unis : ils ont des… « régimes-voyous » :
« Je pense au régime dépravé de Corée du Nord. Il est responsable de la famine et de la mort de millions d’habitants de la Corée du Nord. Il est responsable de la torture, de l’oppression de millions de personnes. Nous nous attaquerons toujours aux violations des droits de l’homme. » [Assemblée Générale de l’ONU à New York, Discours de Donald Trump, 19 septembre 2017. Note de l’auteuse : La transcription du Discours est de moi. Mais la traduction est le fait d’une personne de l’ONU : qu’elle en soit ici remerciée.]
Le président ne plaisante pas avec les « violations des droits de l’homme » et, comme chacun(e) le sait, elles n’existent pas aux États-Unis. En Corée du Nord, selon lui, il y en a plein. Mais il ne donne aucune preuve de ce qu’il affirme : « la famine », « la mort » infligée à des « millions d’habitants »… cela fait partie des sujets récurrents dans la bouche des dirigeants des États capitalistes-impérialistes-colonialistes. Or « la famine » – lorsqu’elle apparaît dans tel ou tel pays – qui l’inflige par les embargos, par les spéculations sur les produits alimentaires ? Et… « la mort », qui la sème par les bombes, par les ADM (Armes de Destruction Massive) ? Sinon, les États qui ont les moyens de dépenser des sommes considérables dans la production d’armes toujours plus sophistiquées, toujours plus destructrices… Le président Trump, n’a-t-il pas commencé son discours par cette phrase : « [N]ous allons dépenser près de 700 milliards de dollars pour la défense et pour le secteur de l’armement. » ? Que détruisent les États-Unis sinon les pays qui n’ont pas le même régime politico-économique que le leur…
L’ONU, quant à elle, laisserait affamer… des « millions d’habitants », pratiquer « la torture », opprimer des « millions de personnes », attenter aux « droits de l’homme »… en Corée du Nord ? Un pays qu’elle honnit sous le diktat des États-Unis qui la nourrissent…
À propos de la Corée du Nord, Mr Trump a des exemples tout cuits…
Celui-ci :
« Un étudiant américain innocent est rentré aux États-Unis après avoir été torturé et il est mort quelques jours plus tard. » [Idem.]
La Corée du Nord, qui a un « dictateur » à sa tête (comme les médias voudraient le faire accroire aux bons peuples qui n’ont ni le temps ni le désir de s’informer ailleurs), a torturé « un » étudiant américain et, au lieu de le trucider pour qu’il ne parle plus – comme font ordinairement les sbires de la CIA (Central Intelligence Agency) de la Grande Jamahiriya États-Unienne sous la houlette du Grand Révolutionnaire Donald Trump -, elle l’a laissé rentrer aux États-Unis pour qu’il puisse tout raconter.
Celui-là :
« Nous avons vu également qu’il y a eu l’assassinat du frère du dictateur en utilisant des agents neuro-toxiques dans un aéroport international. » [Idem.]
Mr Trump ne s’embarrasse toujours pas de preuves de ce qu’il avance : d’abord, il a les poches de son pantalon et de son veston trop petites pour les y mettre, tant y en a, y en a, y en a… et puis, les preuves d’un tel assassinat commis dans un lieu fréquenté par du public, ça ne peut intéresser personne dans le monde.
Et puis… Cet autre :
« Nous savons qu’une fillette de 13 ans a été kidnappée sur une plage dans son propre pays pour devenir une esclave et pour être utilisée par des espions. » [Idem.]
Les Coréens du Nord sont, comme tout le monde le sait grâce à Mr Trump, des voleurs d’enfants et des esclavagistes qui les exploitent.
Le président pourrait multiplier les exemples… Sans retourner ni au temps de la mise au travail forcé des tribus qui vivaient sur les immenses territoires entre les deux mers Atlantique et Pacifique, ni au temps de la déportation des Noir(e)s (hommes, femmes, enfants), du continent africain au continent américain, de leur mise en esclavage, et des sévices qu’ils-elles ont pu endurer durant des siècles… De nos jours… Combien d’hommes torturés dans le camp de Guantánamo et qui ne peuvent plus rentrer dans leurs pays pour raconter ? Combien d’assassinats d’hommes politiques qui ne faisaient plus / qui ne font pas l’affaire des États-Unis en Afrique et ailleurs ? Souvenons-nous… Muammar Gaddhafi. Combien d’enfants qui, chaque année, s’entretuent, à Chicago ou dans d’autres villes, avec des armes à feu ? Mais Donald Trump préfère chercher ses exemples dans d’autres pays… Et qui en cherche en trouve.
Après avoir énuméré trois faits, qui seraient à mettre au passif de la Corée du Nord, pour mettre le sang à la bouche des « gens » qui ne veulent entendre que ce qu’il veut qu’ils entendent, le président à la mèche rebelle en vient à ce qui le chagrine au plus haut point :
« Comme si cela ne suffisait pas, maintenant, la poursuite effrénée de l’arme nucléaire et de missiles par la Corée du Nord risque de menacer des vies. » [Idem.]
Voilà pourquoi Donald Trump attaque la Corée du Nord sur trois petites histoires qui lui ont été insufflées sans que nous ayions les moindres tenants et aboutissants de ce qu’il prétend dénoncer…
Après avoir utilisé « l’étudiant américain », le « frère du dictateur », la « fillette de 13 ans » comme des otages idéologiques, le président Trump arrive au véritable reproche qu’il a à faire à la Corée du Nord : celle-ci prétend détenir l’arme nucléaire pour défendre sa population et ses enfants. Et donc, la Corée du Nord a un « régime-voyou ».
Il oublie ce qu’il a dit dans les minutes précédentes…
« Nous ne nous attendons pas à ce que les différents pays partagent les mêmes cultures, les mêmes traditions, pas même les mêmes systèmes de gouvernement mais nous nous attendons à ce que toutes les nations respectent ces deux devoirs fondamentaux : qu’elles respectent l’intérêt de leurs propres peuples et les droits de toutes autres nations souveraines. »
« C’est là le destin merveilleux de cette institution [FP : L’ONU] et c’est là la base de la coopération et du succès : des nations souveraines, fortes, avec des pays différents, des valeurs différentes, des traditions différentes et des rêves différents ; des nations qui ne font pas que coexister mais qui se respectent et qui travaillent côte à côte ; des nations fortes et souveraines qui permettent à leurs populations de s’approprier leur avenir, de dessiner leur destin ; des nations fortes et souveraines qui permettent à l’individu de grandir en menant la vie prévue par Dieu. »
« Aux États-Unis, nous n’essayons pas d’imposer notre façon de vivre à qui que ce soit »
Il aurait pu ajouter : “Nous utilisons la faim et les bombes.”
« Nous voulons l’harmonie et l’amitié et non pas le conflit et les dissensions. »
À partir de ses dernières esquisses, Donald Trump a peint un décor des États-Unis très idyllique pour les “neuneu(e)s”. Mais, débordé par son imagination, il s’est emmêlé les pinceaux…
« En tant que président des États-Unis, je donnerai toujours la priorité à l’Amérique tout comme vous, en tant que dirigeants de vos pays, vous allez toujours et vous devez toujours placer votre pays en premier. »
« Nous sommes guidés par des résultats, non pas par une idéologie. »
« [T]out comme vous, en tant que dirigeants de vos pays, vous allez toujours et vous devez toujours placer votre pays en premier. »
« Nous devons protéger l’intérêt de nos populations et leur avenir. Nous devons rejeter toute attaque à la souveraineté »
Vilipendant la Corée du Nord, qui ne peut avoir qu’un “régime-voyou”, il s’en prend aux « nations » qui « font commerce avec ce régime ». En quoi cela froisse-t-il le président Trump ? qui affiche son respect pour la différence, pour « des nations souveraines, fortes, avec des pays différents, des valeurs différentes, des traditions différentes et des rêves différents »… En cela que la Corée du Nord n’est pas isolée et que des pays « font commerce avec ce régime » et, qui pire est, peuvent lui vendre « des armes ». Encore un marché juteux qui passe sous le nez des États-Unis…
« Il est vraiment scandaleux de voir que certaines nations font commerce avec ce régime mais l’aident également à acquérir des armes qui mettent en péril le monde. Aucune nation sur terre n’a intérêt à ce que cette bande de criminels acquiert des missiles et l’arme nucléaire. » [Idem.]
Est-il sûr de pouvoir affirmer : « Aucune nation sur terre », de pouvoir insulter les dirigeants de la Corée du Nord : « cette bande de criminels » ? Il est vrai qu’il n’y a pas de « bande de criminels » aux États-Unis, que les « criminels » ne peuvent être qu’ailleurs… Car les États-Unis, eux, produisent des armes, vendent des armes, utilisent leurs armes mais ne « mettent » pas « en péril le monde ».
La preuve ?
« Les États-Unis sont très forts et très patients mais si nous sommes obligés de nous défendre et de défendre nos alliés, nous n’aurons pas d’autre solution que de détruire complètement la Corée du Nord. » [Idem.]
À suivre… Texte 4
Assemblée Générale de l’ONU à New York – Discours de Donald Trump, 19 septembre 2017 – Texte 4 : D’autres « régimes-voyous », selon Trump et ses prédécesseurs à la Maison-Blanche…
Françoise Petitdemange
14-15 janvier 2020