De la valeur d’usage à la valeur d’échange : l’imbroglio

En quoi peut bien consister la valeur d’usage d’un médicament ?
Comment évaluer sa valeur d’échange ?

Développons notre première question : Est-il possible de mesurer l’efficacité de telle ou telle molécule ? Sommes-nous, ici, dans une causalité mécanique, chimique, c’est-à-dire matérielle ? Ou dans des résultats plus ou moins conditionnés par ledit effet placebo qui semble se glisser un peu partout dans le monde médical, et qui est réputé être d’autant plus pertinent qu’il rencontre la croyance, tout autant du médecin que de ses patients ?

Car, bien sûr, la science médicale est très éloignée de maîtriser les processus qu’elle engendre lorsqu’elle envoie, dans un corps particulier et au petit bonheur la chance (quoi qu’elle en dise), tel ou tel produit plus ou moins élaboré dans ses laboratoires, ou plus ou moins issu du hasard des tâtonnements qu’elle est contrainte de s’autoriser, sous peine de ne plus jamais arriver à rien. Mais, s’avancer sur ce terrain, c’est déjà risquer de nuire à l’effet placebo, et c’est ainsi peut-être se fermer l’accès principal à quelque thérapie que ce soit.

Perdre la foi, c’est nécessairement mettre un pied en enfer. De même, toute l’histoire de la finance repose sur le crédit, sur la qualité du crédit… et donc sur la confiance. Il s’agit toujours de « rassurer les marchés ». C’est-à-dire, concrètement, de leur fournir une « réassurance » suffisamment documentée. Cette réassurance concerne l’aptitude à engendrer de la richesse économique quand celle-ci ne s’obtient que par la mise au travail de telle ou telle partie de la population et dans des conditions satisfaisantes de rentabilité.

Ainsi, si nous acceptons momentanément de croiser les systèmes de référence, aboutissons-nous à ceci : sans l’effet placebo du rétablissement de la confiance des détenteurs de capitaux, nulle industrie humaine significative n’obtiendra les moyens réels nécessaires à l’activation de ses capacités productives.

Idem pour l’industrie pharmaceutique…

Revenons maintenant aux professeurs Even et Debré, puisque, en ce qui concerne cette même industrie pharmaceutique, ils nous fournissent une excellente illustration du circuit que prend chez elle l’effet confiance qui lui permet de vivre et de prospérer en mode capitaliste de production, c’est-à-dire dans un système de production destiné à produire, non pas des biens spécifiques (valeur d’usage), mais de la valeur d’échange (médiatisée par un semblant de valeur d’usage) : (page 70)
« Les chercheurs de base croient d’abord avoir identifié une molécule intéressante dans un des laboratoires de recherche académique qu’ils visitent les uns après les autres et la peignent en rose aux services de développement préclinique, qui, après l’avoir étudiée avec l’oeil de Chimène, la vantent pour se faire valoir aux cadres intermédiaires. Ceux-là, pour la même raison, améliorent encore l’image d’une molécule devenue leur enfant et organisent, biaisent, orientent, déforment, travestissent ensuite les essais cliniques, dont ils masquent les failles et amplifient les succès, de telle sorte que les « top décideurs », trompés en cascade, finissent par croire eux-mêmes que leur firme a découvert le Graal. »

… et après eux, si l’affaire se fait, les médecins et leurs patient(e)s.

Pour un semblable processus en matière de finance, consulter (en prison) un dénommé : Bernard Madoff.

Michel J. Cuny


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