L’Afrique par elle-même (2)

Dans l’article que voici, Issa Diakaridia Koné a rassemblé différents éléments qui permettent de faire apparaître la façon dont la politique étrangère russe abordait l’économie africaine avant la guerre de destruction de la Libye et avant la mort de Muammar Gaddhafi (20 octobre 2011).

Le président de la Fédération de Russie était, à ce moment-là, Dmitri Medvedev qui avait choisi une voie manifestement différente de celle suivie par Vladimir Poutine pendant ses deux mandats présidentiels (2000-2004 et 2004-2008). Nous découvrons ici qu’elle était même teintée d’antisoviétisme…

Or, nous allons voir qu’effectivement, dans les années 2008-2011, la politique de la Russie semblait parler le langage du plus pur impérialisme occidental…

Mais très vite, avec le retour de Vladimir Poutine à la tête de l’Etat russe, ces errements-là prendraient fin. Après le déclenchement des deux affaires de Syrie et d’Ukraine, il devenait évident qu’il fallait absolument sortir des schémas d’analyse occidentaux…

Mais revenons donc en 2011, avec Issa Diakaridia Koné

 

Désormais, le Kremlin a son Monsieur Afrique : Mikhaïl Vitalievitch Marguelov. Âgé de 46 ans, ce sénateur rompu aux relations avec l’étranger notamment au sein du Conseil de la Fédération (la chambre haute du Parlement russe) dont il dirige le Comité pour les affaires internationales, vient d’être nommé à un poste flambant neuf, celui de représentant spécial du président russe pour la coopération avec les pays d’Afrique.

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Mikhaïl Vitalievitch Marguelov

 

Le 21 mars 2011, le président russe Dmitri Medvedev lui a non seulement renouvelé la confiance qu’il lui avait accordée en 2008 en le nommant comme son représentant pour le Soudan, mais a de surcroît bombardé cet arabophone diplômé de l’Institut d’Afrique et d’Asie de l’université Lomonossov de Moscou à une fonction continentale inédite.

Selon Maxim Minaev, du Centre de conjoncture politique, Marguelov fait figure de libéral et sa promotion indique que le président Medvedev veut renforcer la «verticale diplomatique» au détriment des cercles technocratiques du ministère des Affaires étrangères russe, le MID. En nommant Marguelov, Medvedev a évincé de son titre de représentant spécial pour les relations avec les chefs d’Etat africains Alexeï Vassiliev, ancien directeur de l’Institut d’Afrique à l’Académie des sciences de Russie, un pur produit du système soviétique.

Mikhaïl Marguelov devra néanmoins composer avec le ministère des Affaires étrangères et les autres administrations qui travaillent sur la région. A l’instar du limogeage fracassant de l’ambassadeur russe en Libye, d’autres têtes au MID vont tomber, dont le vice-ministre Alexeï Saltanov qui a dirigé le département Afrique et Proche-Orient selon l’heddomadaire Itogui. A cet égard, la Libye et plus largement l’Afrique semblent constituer une ligne de fracture dans le tandem Dmitri MedvedevVladimir Poutine au pouvoir en Russie, à la veille d’une élection présidentielle fratricide en 2012.

Mais qu’espère la Russie en Afrique?

« Puissance globale, la Russie a des intérêts à l’échelle de la planète, y compris en Afrique. Notre mission est de défendre ces intérêts. A la différence de nos partenaires européens, la Russie n’a jamais été une puissance coloniale en Afrique. Nous ne l’avons jamais bombardée et n’avons jamais mené d’expéditions punitives contre des peuples africains. »

Dès ses premières déclarations, le nouveau Monsieur Afrique de Moscou inscrit son action dans l’héritage soviétique sur le continent. Un héritage assumé. Pourtant, le bilan de la diplomatie africaine du Kremlin durant la guerre froide est plus que mitigé.

Certes, la superpuissance communiste affichait sur le terrain une présence à la hauteur de ses ambitions en offrant ses services à plus d’une quarantaine de pays africains, à grands renforts de conseillers. Mais ce soutien politique, économique et bien sûr militaire a été payé au prix fort, celui de la dette, s’élevant à 25 milliards de dollars (17,64 milliards d’euros) de l’époque.

Durant les années 1990 en Afrique, la Russie a brillé par son absence, trop occupée qu’elle était à surmonter ses problèmes internes après l’éclatement de l’Union soviétique. Le constat actuel n’est guère reluisant. Les échanges avec l’Afrique ne représentent que 2% du commerce extérieur de la Russie. En 2008, il s’élevait à 2 milliards de dollars (1,41 milliard d’euros). Le volume d’échanges est dix fois inférieur à celui de l’Afrique avec la Chine, qui jouit d’avantages inégalables avec ses liquidités financières colossales et sa croissance économique à deux chiffres.

Pour Marguelov« l’Afrique n’est pas qu’un dépôt mondial dont les fonds disposent de toute la table de Mendeleev [Il s’agit du tableau périodique des éléments chimiques, qui est évoqué, ici, pour dire l’extraordinaire richesse de sous-sol africain], mais elle est aussi une source de problèmes à caractère global qui, outre des causes fréquemment énoncées, sont liés au dédain envers l’évolution du continent depuis la fin de la guerre froide ».

Le continent africain figure parmi les priorités de la politique extérieure de la Russie, insiste-t-on à présent du côté de Moscou. Cette ambition se situe sur le plan économique. Mais son effacement en Afrique lui a coûté cher et ses positions actuelles s’avèrent fortement en retrait dans un espace de concurrence exacerbée.

Mais Moscou veut compter aussi sur le contingent africain de diplômés en Union soviétique. Suivant les conseils de l’Institut d’Afrique, la Russie lance presque un appel à tous les « soyouzniki », ces milliers d’ingénieurs, de médecins, d’enseignants et autres acteurs du développement formés en URSS et dont certains occupent des positions de premier plan dans leurs pays respectifs. Selon l’Institut d’Afrique de l’Académie des Sciences de Russie, il faut tirer profit de la présence de ces anciens boursiers africains qui donnent une autre dimension au monde russophone.

Dossier à  suivre…

issa

Issa Diakaridia Koné
est né à Koutiala, région de Sikasso, au Mali.

Il a 27 ans.


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