IV. 6 – Les chercheurs de places du CNS (Conseil national syrien)

IV. 6 – Les chercheurs de places
du CNS (Conseil national syrien)

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Dans leur imagination,
les exilé(e)s syrien(ne)s le voyaient comme celui-ci…

La Turquie, la France… Beaucoup de choses se passent aussi au Qatar

Après avoir commencé ses études à Damas, Burhan Ghalioun, les a poursuivies à Paris. Diplômé de l’Université Paris-1 – Panthéon-Sorbonne, il a été professeur de sociologie politique. Au début des années 1980, il a adhéré à une association d’exilé(e)s syrien(ne)s jusqu’à en prendre la direction, puis il a co-fondé l’organisation arabe des droits de l’homme. À partir de l’arrivée de Bachar El Assad, en 2000, à la présidence de la République Arabe Syrienne, il s’est investi de plus en plus dans l’opposition. Obnubilé, comme beaucoup de bourgeois moyens dont les universitaires sont les exemples-types, par le siècle dit des Lumières en France (par siècle des Lumières, il faut entendre avènement de la grande bourgeoisie au pouvoir contre le peuple), il est un adepte non pas de la démocratie mais de l’oligarchie bourgeoise.

En mars 2011, alors que le mandat présidentiel de Bachar El Assad doit arriver à expiration en 2014, la Syrie est le maillon d’une chaîne de déstabilisations intérieures, préludes à autant de guerres civiles, lancées de l’extérieur, d’abord en Côte d’Ivoire, puis en Tunisie, en Égypte, en Libye, par quelques États occidentaux et les très démocratiques monarchies du Golfe, servi(e)s par leurs médias-valets. L’opposition, qui souvent s’est exilée elle-même, veut se mêler des affaires intérieures d’une Syrie qu’elle a quittée parfois depuis des décennies. En juin, Burhan Ghalioun se rapproche des Frères musulmans qu’il considère comme partie intégrante de l’opposition “syrienne”. Il devient président du CNS (Conseil national syrien) en septembre 2011 et le restera jusqu’en mai 2012.

Voici ce qu’il disait, à Paris, en présence d’Alain Juppé, le 23 novembre 2011 : « Nous sommes venus ici aussi pour discuter de notre feuille de route concernant la possibilité d’une transition démocratique et pacifique vers un système démocratique. Nous sommes venus ici pour défendre justement cette option : la priorité d’une solution pacifique qui nous… qui évitera à la Syrie la guerre civile puisque il y a de plus en plus des menaces, des risques d’affrontements, de violences civiles et également l’intervention militaire que tout le monde veut éviter effectivement, pas seulement les Syriens mais les Syriens en particulier. » [Vidéo, Alain Juppé et Burhan Ghalioun, président du Conseil national syrien (23 novembre 2011).] Un universitaire, peut-il être aussi naïf ?

Comment peut-il faire accroire que le renversement d’un président, élu en juillet 2000, puis réélu, en mai 2007, par une très grande majorité de la population vivant en Syrie (de quoi faire pâlir d’envie les pseudo-démocrates des quelques États occidentaux qui ne veulent voir, là, que des élections truquées), va s’effectuer par une « transition démocratique et pacifique » alors que, depuis mars 2011, il y a une guerre civile doublée d’une guerre coloniale ? alors que la Syrie a été, comme la Libye, attaquée par des manifestants pacifiques, à main armée, qui voulaient s’emparer des armes dans les commissariats de police et les casernes ? Comment peut-il faire accroire qu’un groupe d’opposant(e)s, exilé(e)s pour la plupart, va se mettre au pouvoir en faisant fi d’un président élu, réélu par la population syrienne, sans recourir à la force contre la force légale ? La naïveté – feinte ou pas feinte – est, à ce niveau-là… criminelle. Alors, la tromperie…

Le 24 mai 2012, Burhan Ghalioun démissionne suite à des critiques au sein de l’organisation : il lui est reproché d’avoir permis aux Frères musulmans de trop s’imposer dans le CNS, et de négliger les liens entre le CNS lui-même et les militant(e)s. Mais il ne pointera pas au chômage… Il demeurera au bureau exécutif jusqu’au 9 novembre 2012. D’ailleurs, deux jours après, le 11 novembre, une autre organisation, la CNFOR (Coalition nationale des forces de l’opposition et de la révolution), va être créée ; dès janvier 2013, il se trouvera dans le comité restreint comprenant 6 personnes…


Le 9 juin 2012, à Istanbul, le Kurde, Abdel Basset Sayda, qui a pris le relais à la présidence du CNS, est aussi un universitaire dissident qui a enseigné trois ans, au début des années 1990, en Libye, pays qu’il a ensuite quitté pour la Suède où il vit avec sa famille. Il est un opposant de longue date aux Assad, père et fils. Comme bon nombre de moyens bourgeois, il est attaché aux droits de l’homme (bourgeois). Bien qu’il soit Kurde, il est loin de faire l’unanimité chez les Kurdes : si l’Union des forces démocratiques kurdes (à tendance bourgeoise) espère tirer avantage de sa présence à la présidence du CNS, l’Union démocratique du PKK (
Partiya Karkerên Kurdistan ou Parti des travailleurs du Kurdistan) et, nommément Abdullah Öcalan, et le Conseil national kurde le voient comme un homme peu fiable. Ce qui n’est pas peu dire… L’homme est animé par le renversement qu’il croit inéluctable du président Bachar El Assad mais il craint le remplacement du gouvernement légal syrien par un gouvernement trop révolutionnaire… Eh bien oui… un bourgeois moyen ne veut surtout pas d’une réelle démocratie (gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple).

La Turquie, la France, le Qatar… Et puis les ÉAU (Émirats Arabes Unis)… Le 29 juillet 2012, donnant une conférence de presse à Abou Dabi (ÉAU), Abdel Basset Sayda se distinguera en réclamant des armes : « Nous voulons des armes qui arrêteraient les chars et les avions à réaction. C’est ce que nous voulons. » [Aljazeera, Les civils fuient Alep alors que l’assaut continue, source Agences.] Puis il évoquera à ce moment-là, soit un an après le début de la déstabilisation de la Syrie, un procès contre Bachar El Assad : « Il y a des massacres commis, nous croyons que Bashar al-Assad devrait être jugé. C’est un criminel et il ne faut pas lui donner un abri. » [Idem. Nd’A : Par « abri », il faut entendre asile politique.] Autrement dit, ce professeur fait déjà le procès de Bachar El Assad et l’accuse de crimes ; selon lui, sans doute, Bachar El Assad, président réélu de la République Arabe Syrienne, ne devrait pas défendre son pays et le peuple syrien contre l’agression militaire des exilé(e)s – via l’Armée syrienne libre – et de quelques États occidentaux à la remorque des monarchies du Golfe (Arabie saoudite, Qatar)… Ce professeur se fendra de remerciements empressés en direction de l’Arabie saoudite qui, après avoir aidé à la création d’Al-Qaïda, dans les années 1980, recueille des fonds qu’elle met à la disposition des fauteurs de guerre parmi lesquels, il faut le souligner, se trouvent des fauteuses très actives dans la parlote médiatique. Le 12 août de cette année 2012, il appelle de tous ses vœux la communauté internationale (occidentale) à faire interdire le survol des frontières syriennes.

Au cours de la réunion du 9 novembre 2012, à Doha (Qatar), Abdel Basset Sayda quitte la présidence du CNS mais demeure au sein de son bureau exécutif. Lui non plus ne sera pas au chômage : il passera, comme son prédécesseur, de la présidence du CNS à la CNFOR (Coalition nationale des forces de l’opposition et de la révolution) créée deux jours après, le 11 novembre.


C’est Georges Sabra qui, d’abord membre du bureau exécutif, est élu à son tour, à Doha, le 9 novembre 2012, à la présidence du CNS. Georges Sabra ne sera pas venu à Paris pour rien, ni à Doha, d’ailleurs…

Le voici tout juste élu qui déclare : « Je veux remercier mes collègues et mes amis, ici. Je promets d’agir en bonne foi en tant que représentant, car ils m’ont choisi comme président du Conseil national syrien pour la révolution syrienne. » « Aidez les Syriens à expulser le régime en leur fournissant des armes. Nous demandons à la communauté internationale de nous aider à nous défendre. Nous voulons des armes pour assurer la dignité et la sécurité à nos enfants. » « Tous les Syriens sont menacés, chaque jour, à l’intérieur et à l’extérieur de la Syrie. La communauté internationale doit assurer aux Syriens le droit à la sécurité, à la paix et à la vie. » [Vidéo, Syrie : Georges Sabra élu président du CNS, 9 novembre 2012.] De quelle révolution parle monsieur Sabra avec des exilé(e)s syrien(ne)s, universitaires, fils et filles de diplomates syriens, etc. De quelle révolution parle-t-il en appelant les armées étrangères à la Syrie pour renverser un président élu et un gouvernement légal ? Monsieur Sabra demande à la communauté internationale (occidentale) de les « défendre » contre qui ? contre quoi ? Monsieur Sabra demande aussi des armes… pour « assurer aux Syriens le droit à la sécurité, à la paix et à la vie » ? N’est-ce pas plutôt pour attaquer le président et le gouvernement syriens, et, en conséquence, la majeure partie de la population qui vote en faveur de Bachar El Assad ?

Il est assez piquant de constater que la France des partis, notamment du parti socialiste, qui s’est échinée, depuis l’après seconde guerre mondiale, pour amoindrir le parti qui avait le plus contribué à la Résistance contre l’oppression du gouvernement de Vichy, collaborateur des nazis, et contre les nazis eux-mêmes – le Parti communiste français –, soutient, de toutes ses forces politico-médiatiques… Georges Sabra, un instituteur, qui a effectué ses études en Syrie avant de les poursuivre aux États-Unis et qui est, depuis 1970, adhérent du Parti communiste syrien, lequel parti a été renommé, en 2005, le Parti démocratique du peuple. Dorénavant, il est présenté comme « ancien communiste », et « de confession chrétienne » : sans doute doit-il le soutien qui lui est apporté au mot « ancien » communiste et à la confession « chrétienne »…

Georges Sabra est arrivé de Syrie, en décembre 2011, avec l’aide de la France en la personne du diplomate, Éric Chevallier, un médecin devenu, vers la fin des années 1990, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Emploi et de la Solidarité, Bernard Kouchner, puis conseiller spécial du même Kouchner tandis que ce dernier était devenu, en 1999, Haut représentant du secrétariat général de l’ONU au Kosovo, et le resterait jusqu’en 2001.

Vraiment, le monde est petit…

Bien sûr, tout cela se passe entre “gens de bonne compagnie”, sans armes, avec des droits de l’homme plein la bouche, et sous l’assentiment actif de la LA (Ligue Arabe) qui n’en finit plus de se renier !

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Mais la réalité pourrait bien apporter,
aux exilé(e)s syrien(ne)s, celui-là…

Suite : IV. 7 – La Conférence internationale des Ennemis du peuple syrien

Françoise Petitdemange
3 janvier 2017


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