J. Cahuzac : un médecin passé, avec armes et bagages, dans le camp de l’industrie pharmaceutique

À y regarder de près, il apparaît que, depuis les quatorze années qui séparent son article de 1999 dans la revue « Pouvoirs » du scandale qui devait le frapper en 2013, les propos d’autrefois de Jérôme Cahuzac n’ont été démentis que sur un point : il déplorait l’absence en France – et par incapacité de l’Etat – d’un grand groupe pharmaceutique de caractère véritablement international… Nous voici servis avec Sanofi.

Mais cette transformation essentielle ne contredit en rien la pertinence de l’ensemble de l’analyse qu’il nous fournissait en 1999. Bien au contraire, elle lui offre une illustration parfaite… et qui ne peut que nous faire frémir quant à la garantie que trouveraient nos santés dans l’actuel système de mise au point et de diffusion des médicaments. Regardons-y de plus près.

Ayant entamé sa vie professionnelle par l’exercice de la médecine, Jérôme Cahuzac est tout à fait fondé à commencer son analyse des rapports unissant le corps médical, l’Etat et l’industrie pharmaceutique par la situation du premier cité.

Voici d’abord ce que cela donne :
« La prescription médicale est indispensable au succès de l’industrie pharmaceutique […] » (page 1 du document)

C’est ce que développait le paragraphe immédiatement antérieur :
« Les agents économiques que sont aussi les médecins confèrent à l’industrie son poids économique, puisque leurs prescriptions conditionnent la vente des médicaments : en 1997, 82 % de la consommation n’a pu être délivrée que sur présentation d’une ordonnance. Si le pouvoir médical existe, c’est donc, après les patients, sur l’industrie pharmaceutique qu’il s’exerce. » (page 1)

Nous voyons que, sitôt abordée la question de l’économie de la santé et du « succès » de l’industrie pharmaceutique, les « patients » se trouvent réduits à la portion congrue… et leur santé avec. Serait-ce seulement une illusion de perspective?

En tout cas, Jérôme Cahuzac tient à nous signaler aussitôt une autre possible erreur de perspective :
« La relation entre le corps médical et l’industrie n’est peut-être pas aussi déséquilibrée, au profit du rôle et de l’influence des médecins, que ne pourrait le laisser penser le constat fait plus haut. » (page 2)

Pour obtenir une idée plus précise de ce à quoi il est fait ici allusion, il suffit, une nouvelle fois, de revenir vers un paragraphe immédiatement antérieur :
« […] celle-ci [l’industrie pharmaceutique] est indispensable au progrès thérapeutique, puisque c’est de sa recherche que sont issues l’écrasante majorité des molécules réellement innovantes et porteuses d’avancées thérapeutiques. Mais alors, on peut penser que le pouvoir médical est réduit au strict devoir médical, pour se confondre avec lui, tant on voit mal les médecins ne pas mettre au service de leur art ce que la recherche et l’industrie pourraient apporter de mieux ou de beaucoup mieux. De fait, on les verrait mal prescrire ce qui pourrait être inutile voire dangereux. » (pages 1-2)

En 1999, pour les plus naïfs, sans doute… Mais après le gentil et joli Médiator, il y a ici quelque chose qui nous fait tout de même un peu mal au… coeur. Si pas pire.

À suivre…

Michel J. Cuny


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