Pour qui aime les jeux de massacre, MM. Even et Debré sont un vrai régal, qui ne doit cependant pas faire perdre de vue que ceux qui nous le mijotent se situent délibérément dans un contexte politique marqué, dont nous allons peu à peu essayer de cerner la perspective principale.
Politique, ai-je écrit… Voici, et dans la typographie d’origine (que je maintiens également pour l’ensemble des citations de cette note), ce qui ne permet plus de se méprendre :
« Ce guide poursuit un double objectif, MEDICAL, en s’adressant aux patients et aux médecins, et POLITIQUE, en visant à mieux informer les ministres sur ce que sont exactement les médicaments et l’industrie pharmaceutique, pour les aider à prendre des décisions nécessaires. » (page 19)
Or, tout de go, nous apprenons également qu’il ne s’agit pas d’un grand cri à laisser sans lendemain, mais d’une stratégie de longue haleine :
« Ce guide n’est qu’un premier essai, une première édition. Il y en aura d’autres. » (page 20)
…Le tout tendant, en particulier, à bien séparer les différentes cibles : d’un côté, la population en général (patients et médecins), de l’autre les ministres… de la Santé. MM. Even et Debré – sont-ils d’ailleurs aussi seuls qu’il y paraît ? – s’offrent ainsi comme conseillers spéciaux des ministres de la Santé, auxquels, par une sorte de coup d’Etat tout ce qu’il y a de plus pacifique, mais asséné de main de maîtres, ils ouvriront la vraie carrière que le budget de la Santé doit, en toute logique, leur mériter d’atteindre :
« Il faut un grand ministère de la Santé indépendant et maître de son budget non pas dissous dans un super ministère du Travail, de l’Emploi, de la Solidarité ou des Affaires sociales et au budget géré à Bercy, comme c’est aujourd’hui le cas. » (pages 14-15)
Par anticipation – et sous bénéfice d’une petite auscultation à venir -, je lui donnerai un nom : le ministère Sanofi.
Or, ce budget mérite effectivement bien des égards – et d’être conduit par de vrais spécialistes – puisque, à elle seule, la santé qui « est la principale préoccupation des citoyens, de leurs enfants et de leurs proches » est telle que :
« Son coût dépasse de loin le budget de l’Etat et de tous les autres ministères réunis et, avec 230 G€, elle consomme 12% de la richesse nationale (PIB). » (page 14)
Il faut donc libérer ce bel animal des contraintes malheureuses que font peser sur lui ses tristes compères du ministère d’aujourd’hui : Travail, Emploi, Solidarité ou Affaires sociales, et d’ailleurs, pour que l’on ne si trompe, voici ce que devient le premier dès la seconde énumération de ce qui pèse sur lesdits ministres de la Santé :
« Il est inconcevable de les placer dans des conditions ingérables, qui, avec le chômage [qui vient donc ici en lieu et place du travail], la solidarité et la santé, concentrent les plus grandes difficultés du pays. » (page 15)
Eh oui, en dehors de la santé, ce ministère est un peu le séjour des plus pauvres, des plus exploités, etc!… Alors que la santé – par sa branche médicaments et en dehors de ses compagnons d’infortune – flambe sur les places financières : Sanofi n’est-elle pas désormais la première capitalisation boursière (prix de l’action multiplié par la quantité d’actions émises) en France ?
Mais nous avons, ici encore, l’effet « chaud-et-froid » dont nous ne nous lassons pas. Le « coup d’Etat » sera-t-il donc lui aussi à double tranchant ? C’est tout au moins ainsi qu’il s’annonce puisqu’il s’agit…
« de briser à l’intérieur les résistances des administrations et, à l’extérieur, celles des puissants lobbies industriels ? » (page 15)
Mais certainement pas les résistances de Sanofi, bien sûr!…
Michel J. Cuny
PS : Amusons-nous d’une petite coïncidence qui nous vient d’un communiqué de CercleFinance.com en date du 31 décembre 2012 :
« Sanofi effectue une fausse sortie sous 71€ et se transforme en quelques dizaines de minutes en locomotive du CAC40. Le titre rebondit de +1,5% et revient au contact du zénith annuel des 72,25€ (testé à une dizaine de reprises entre le 11 et le 27/12). »