IV. 62 – Plutôt l’ÉI que des pays arabes libres, souverains et indépendants ; Astana III (Kazakhstan), 14-15 mars 2017

Bachar Al-Ja’afari

IV. 62 – Plutôt l’ÉI que des pays arabes
libres, souverains et indépendants ;
Astana III (Kazakhstan), 14-15 mars 2017

L’ONU fault à sa tâche notamment durant les guerres menées par les dirigeants occidentalo-golfico-sionistes contre les pays africains et arabes (Irak, Tunisie, Égypte, Libye, Syrie). La Turquie, qui joue double jeu, a envoyé des forces armées sur le sol syrien sans avoir obtenu l’aval de l’État syrien. Depuis 2016, elle poursuit son jeu belliqueux avec l’opération « Bouclier de l’Euphrate ». Soutenant certains groupes d’opposants contre l’armée syrienne, elle contribue à faire perdurer la guerre.

Walid Mouallem,
ministre syrien des Affaires étrangères

À la veille de la troisième série de pourparlers au Kazakhstan, le ministre syrien des Affaires étrangères et des Expatriés, Walid al-Mouallem, devait déplorer, auprès de l’ancien Premier ministre socialiste portugais, António Manuel de Oliveira Guterres qui a succédé, le 1er janvier 2017, à Ban Ki-moon en devenant Secrétaire général de l’ONU, et auprès du président du Conseil de sécurité de l’ONU, les façons de faire de la Turquie qui porte atteinte à l’intégrité territoriale, à la souveraineté et à l’unité de son pays ; il signalait le fait que la Turquie violait la Charte de l’ONU et les résolutions prises contre le terrorisme ; il demandait à l’ONU d’intervenir auprès de la Turquie pour qu’elle retirât ses troupes du sol syrien et contribuât réellement à la paix dans le monde… « L’armée turque a agressé davantage des territoires syriens et tué davantage de citoyens syriens à Boueiheij, Boughaz, Amyana et Mortafa’ 543. » [SANA (L’Agence Arabe Syrienne d’Informations, R.F./L.A., Damas : La Syrie réclame à l’Onu d’obliger la Turquie à retirer ses forces des territoires syriens, 10 mars 2017.] Mais l’ONU, qui ne respecte pas sa propre Charte, encore moins le préambule de la Charte, et qui laisse tout faire n’est qu’une organisation dépendante des puissances impérialistes.

Le 9 mars, les forces turques avaient attaqué, « à l’artillerie et aux missiles » et au prix de nombreux morts et blessés, des troupes de l’armée syrienne et des forces alliées qui avaient pris position dans la province d’Alep après la reprise de la ville.

De même que la coalition occidentalo-golfico-sioniste, les forces turques font durer la guerre en soutenant les groupes d’opposants armés, y compris des « groupes terroristes », contre l’armée syrienne. Ces intrusions étrangères dans les affaires intérieures de l’État syrien font des coupes sombres dans la population syrienne en tuant et en blessant des milliers de Syriens et de Syriennes (hommes, femmes, enfants) que ces États belliqueux prétendent protéger et participent amplement à la destruction des infrastructures du pays. Tout cela pour imposer des institutions politiques et un système économique dont la population ne veut pas.

Le ministre syrien des Affaires étrangères devait ajouter ces précisions destinées à montrer à l’ONU que son gouvernement n’est pas dupe : « Ces attaques sont des tentatives directes de freiner le succès et la progression de l’armée arabe syrienne et des forces alliées dans l’éradication des réseaux terroristes dans le but de sécuriser la banlieue d’Alep et tous les territoires syriens. » [Idem.]

Le jour même où commencent les pourparlers d’Astana III, l’État sioniste, par son journal Raï al-Youm, lance de fausses informations contre l’Iran car, jusqu’à preuve du contraire, les États colonisateurs sont plutôt des États qui ne jurent que par le capitalisme (exploitation du travail de la majorité des êtres humains par la minorité accapareuse), l’impérialisme (domination du monde par cette minorité), le colonialisme (usurpation de territoires habités par d’autres peuples)…

Tandis que l’armée syrienne et les forces alliées vont porter leurs efforts sur la province de Raqqa pour la libérer des groupes armés de l’ÉI (État Islamique), le journal sioniste, en se faisant le porte-parole de l’État-colonies, confirme la collusion des États occidentalo-golfico-sioniste avec certains groupes de l’ÉI : plutôt l’ÉI que des pays arabes libres, souverains et indépendants… « Si Daech est bouté hors de Raqqa, cela voudra dire en clair que l’Iran et le Hezbollah auront le contrôle du Golan. » [Cité dans ISNA (Iranian Students’ News Agency), avec PressTV, Israël inquiet de la présence iranienne à la bataille de Raqqa, 14 mars 2017.]

Mais encore… « Si les Iraniens finissent par s’engager dans la bataille de Raqqa, bastion de Daech dans l’est de la Syrie, cela leur permettra de s’ouvrir un canal terrestre et hautement stratégique, les reliant à l’est de la Syrie. Ce sera un itinéraire qui partira de Damas pour aller à Beyrouth puis à Bagdad, ce qui posera un réel problème sécuritaire à Israël sur ses frontières. » [Idem.] « Bien mal acquis ne profite jamais », tel est le proverbe, issu d’un texte de François Rabelais (v. 1483-1553), qui sied parfaitement à l’État colonisateur.

Hossein Amir-Abdollahian

Lors de la rencontre d’Astana organisée, comme les deux précédentes, dans la capitale kazakhe sous l’égide des trois pays (Russie, Iran, Turquie), en dehors des “Assis” de l’ONU, les délégations russe, iranienne (conduite par le vice-ministre iranien des Affaires étrangères, chargé des pays arabes et africains, Hossein Amir-Abdollahian), et turque devaient discuter de nouvelles mesures à prendre pour maintenir durablement le cessez-le-feu. Comme lors des premières rencontres, la délégation états-unienne était représentée par l’ambassadeur des États-Unis au Kazakhstan auquel Washington avait adjoint un émissaire spécial.

Le cessez-le-feu, prévu dans les textes, n’incluant pas l’arrêt de la lutte contre les groupes de l’État Islamique, l’armée syrienne peut donc poursuivre la lutte contre eux afin de libérer son territoire : « Les organisations terroristes désignées comme telles par le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies sont exclues du cessez-le-feu. » https://unefrancearefaire.com/2017/05/25/iv-55-leclaircie-syrienne-qui-vient-de-la-russie-et-de-la-turquie/

Or, les autres groupes d’opposants armés, soutenus par la Turquie, faisant semblant d’oublier cette clause, arguent de cette poursuite de la lutte pour ne pas participer à ces pourparlers : selon eux, l’armée syrienne viole le “cessez-le-feu” avec le soutien de la Russie.

Par contre, des opposants armés, appartenant au Front du sud syrien, qui combattent dans la province de Deraa et qui reçoivent le soutien de la Jordanie, ont décidé d’envoyer une délégation au Kazakhstan.

Lors de son intervention, Bachar Al-Ja’afari ne se gêne pas pour dénoncer le double jeu de la Turquie en ces termes : « Le côté turc veut entraver le succès d’Astana, et nous sommes parfaitement conscients que le fait que les groupes armés ne soient pas venus vise cet objectif-là, et que cette décision de ne pas venir est dicté par celui qui parraine ces groupes. » « C’est la Turquie qu’il faut interroger lorsque les groupes armés ne participent pas. » « Nous sommes prêts à assurer le succès d’Astana (…) avec ou sans la participation des factions armées. Leur absence à Astana démontre l’indécence de leur politique. » [Al Manar TV, 3ème round des pourparlers d’Astana, avec la présence de l’émissaire de Washington, sans les rebelles pro-turcs, 14 mars 2017.]

Comme pour répondre aux opposants armés qui prétendent dénoncer une violation du cessez-le-feu par l’armée syrienne, Bachar Al-Ja’afari rappelle la différence que fait l’État syrien entre les diverses factions d’opposants et annonce une nouvelle discussion sur la « séparation entre les groupes armés d’une part et le front al-Nosra et Daesh de l’autre ». [Idem.]

Dmitri Peskov,
porte-parole du Kremlin

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, quant à lui, souligne le fait que les pourparlers « sont rendus vraiment compliqués par les différences qui existent dans les approches des différentes parties ». [Idem.] Il est vrai que les États-Unis, l’Arabie saoudite, la Turquie, la Jordanie n’ont pas les mêmes intérêts que la Syrie, la Russie, l’Iran, le Liban

Le vice-ministre kazakh des Affaires étrangères, Akylbek Kamaldinov, donne lecture de la déclaration de clôture de la troisième séance des pourparlers :
« Les parties ont insisté sur leur détermination à renforcer le cessez-le-feu. Elles ont convenu de se rapporter mutuellement les actes de violation de la trêve, d’assurer la baisse de ces actes et de renforcer l’efficacité du mécanisme de surveillance tripartite. » [AA Monde, Négociations d’Astana III : L’Iran désormais un garant officiel de la trêve en Syrie, 15 mars 2017.]

Après quoi, il devait annoncer la tenue, les 18-19 avril 2017, d’une réunion préparatoire qui aurait lieu à Téhéran (Iran), en prévision d’une quatrième série de pourparlers prévue pour les 3 et 4 mai suivants.

Astana III – 14-15 mars 2017

Lors de cette troisième rencontre, l’envoyé spécial de l’ONU, Staffan de Mistura, annonçait une cinquième série de négociations à Genève, le 23 mars, sous l’égide de l’ONU. Comme l’avait fait remarquer, non sans humour, Sergueï Lavrov : l’ONU ne bouge que lorsqu’elle se sent dépassée par d’autres initiatives dont elle n’a pas le contrôle direct.

Et donc…
Voici le tout nouveau Secrétaire général de l’ONU, António Manuel de Oliveira Guterres, qui lance deux appels.

Le premier…
« Tout d’abord, tirer le meilleur parti du cessez-le-feu du 30 décembre 2016 établi par les garants des réunions d’Astana, l’améliorer davantage et veiller à ce que l’aide humanitaire puisse atteindre tous ceux qui sont dans le besoin en Syrie sans obstacles et entraves. » [UN News Centre, Six ans après le début du conflit, l’ONU rappelle que la paix en Syrie est un « impératif qui ne peut pas attendre », 15 mars 2017.]

Qu’est-ce qui est voulu ici ? Une « aide humanitaire » qui apportera des armes aux opposants ou des soins à la population et aux combattants, de quelque groupe qu’ils soient ? Si les États occidentaux et les monarchies du Golfe ne déstabilisaient pas les pays jusqu’à provoquer des guerres, les populations n’auraient besoin ni d’aide armée étrangère ni d’aide humanitaire et elles pourraient poursuivre le développement de leurs pays à leur rythme et selon leur volonté.

Mais les ligues des « droits de l’homme », qui pullulent un peu partout dans le monde, poussent aux guerres, au nom des valeurs universelles : propriété des moyens de production et d’échange concentrée dans les mains de quelques personnes, familles et groupes de la bourgeoisie qui permet l’exploitation du travail d’une majorité d’êtres humains par une minorité ; liberté d’expression pour tous ceux et toutes celles dont le discours s’adapte aux schémas idéologiques médiatisés pour le compte de la grande bourgeoisie d’affaires, etc.

L’autre appel d’António Manuel de Oliveira Guterres
« Deuxièmement, tous ceux qui ont une influence sur les parties au conflit doivent s’efforcer de surmonter leurs différences et de travailler ensemble pour mettre fin au conflit. » « C’est-à-dire contribuer à la réussite des négociations inter-syriennes à Genève sur la base du communiqué de Genève et les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, y compris la résolution 2254 (2015). » [Idem.]

Il s’agit d’un vœu pieux puisque tout a été fait, de l’extérieur de la Syrie, pour financer et armer les groupes d’opposition jusqu’à obtenir une guerre civile qui devient une guerre occidentalo-golfico-sioniste contre le pays à détruire. La guerre impérialiste ayant rempli son office presque au maximum… un pays détruit, des centaines de milliers de mort(e)s, de blessé(e)s, de déplacé(e)s, des millions d’émigré(e)s, de réfugié(e)s, l’ONU crie « au secours ».

Mais pour que le chaos y soit, les “bien intentionné(e)s” clament que la paix ne peut revenir que s’il y a des « négociations », lesquelles ne sont destinées qu’à évincer le Président élu, le gouvernement en place… Des négociations ? Bien sûr ! La diplomatie devrait toujours supplanter le recours aux armes. Mais est-il possible, pour le représentant de l’État syrien, de négocier ? Avec quels Syriens, ceux de l’étranger dont le discours est dicté ? ou ceux armés contre l’État syrien ? Derrière les uns comme derrière les autres, les États occidentalo-golfico-sionistes ne prennent même pas la peine de se dissimuler…

Autrement dit, rien de nouveau à l’ONU : les hommes changent mais l’idéologie reste la même. L’élection présidentielle de 2014 en Syrie ? Niée. La population syrienne ? Niée.

D’ailleurs, tant que l’ONU ne respectera pas le Préambule de sa Charte, elle ne sera jamais que l’“Organisation des Nations Usurpatrices” !

Suite : IV. 63 – Un usurpateur qui n’a pas la conscience tranquille…

Françoise Petitdemange
18 juin 2017


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