IV. 54 – La reprise du contrôle de toute la ville d’Alep par l’armée syrienne

IV. 54 – La reprise du contrôle de toute la ville d’Alep
par l’armée syrienne

Depuis quatre ans, la deuxième ville de Syrie était divisée : la partie ouest était restée sous le contrôle du gouvernement tandis que la partie est se trouvait aux mains de l’opposition armée.

Le lundi 5 décembre 2016, l’armée syrienne, appuyée au sol par les troupes iraniennes et libanaises et soutenue par son aviation et celle des Russes, était sur le point de reprendre la partie est d’Alep à l’opposition armée. Devant le refus de celle-ci de quitter ses positions intenables, le trio du Conseil de sécurité : États-Unis, France, Grande-Bretagne voulait faire voter une Résolution à l’ONU en vue d’une trêve. Mais l’État syrien était opposé à un cessez-le-feu qui aurait permis à l’opposition armée et aux Fronts islamiques de se réorganiser et de se réarmer en vue de nouveaux combats, pour tenter de reprendre leurs positions perdues, qui auraient fait encore des morts et des morts. La Fédération de Russie avait logiquement utilisé son veto.

La semaine précédente, le ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov avait proposé à son homologue états-unien, John Kerry, la tenue d’une réunion qui aurait dû avoir lieu le lundi 5 décembre, à Genève (Suisse), afin de préparer une évacuation des civils qui le souhaitaient et de tous les rebelles, sans exception, de l’est d’Alep. Cependant, les États-Unis n’ayant pas donné suite à cette proposition, la réunion avait dû être annulée : pour se dédouaner de toute responsabilité, John Kerry avait proposé une rencontre, en marge de la réunion annuelle de l’OSCE (Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe), à Hambourg (Allemagne) ; la chancelière, Angela Merkel, n’hésitait pas, quant à elle, à critiquer la Syrie, la Russie et l’Iran. Cette rencontre du 7 décembre en Allemagne ne donnerait aucun résultat alors que six des pays occidentaux, impliqués dans cette guerre, réclamaient à cor et à cri un cessez-le-feu immédiat et priaient la Russie et l’Iran de faire pression sur le gouvernement syrien pour l’obtenir, mettant en avant les raisons humanitaires derrière lesquelles il fallait voir la réalité des combats : les rebelles étaient en train de perdre leurs derniers bastions dans l’est d’Alep.

Dans la nuit du mardi 6 au mercredi 7 décembre, l’armée syrienne avait déjà repris pied dans les trois quarts de cette partie est d’Alep obligeant l’opposition armée à se replier vers le sud-est de la ville. Durant le mois de décembre, l’armée syrienne allait récupérer le contrôle sur toute la ville. Les combats continueraient dans la province d’Idleb, ville voisine d’Alep, qui restait à l’opposition.

La reprise d’Alep (Syrie),
par l’armée de la République Arabe Syrienne,
soutenue par les troupes russes, iraniennes, libanaises

Face à une déroute des rebelles dans ce qu’ils considéraient comme leur territoire, le Conseil de sécurité de l’ONU se réunissait, une nouvelle fois de toute urgence, le 13 décembre, afin d’évoquer la situation et de procéder, dès le lendemain 14, à une évacuation des civils et des rebelles.

Au Conseil de sécurité de l’ONU, M. Ban Ki-moon ouvrait la séance en affirmant que des dizaines de personnes civiles avaient été tuées dans des bombardements ou exécutées par l’armée de la République Arabe Syrienne. Des personnes civiles tuées dans les bombardements, il y en a, hélas, dans toutes les guerres : reste à savoir si les personnes civiles sont visées intentionnellement ainsi que l’OTAN fait partout où elle bombarde, que ce soit en Afghanistan, en ex-Yougoslavie, en Irak, en Libye, pour dire ensuite qu’il s’agit de « bavures »… ou si elles sont tuées accidentellement ? Quant aux personnes civiles « exécutées par l’armée syrienne », le Secrétaire général de l’ONU en parlait sans apporter de preuves…

Mme Power au Conseil de sécurité de l’ONU,
13 décembre 2016

À cette occasion, la représentante des États-Unis, Mme Samantha Power, s’en prenait vivement à la République Arabe Syrienne, à la Fédération de Russie et à l’Iran : « Une centaine d’enfants sont coincés dans les décombres d’un bâtiment. Des terroristes, clairement. Ces jeunes enfants doivent être des terroristes. Parce que tous ceux qui ont été bombardés ou exécutés sont des terroristes. Tous. Même les bébés. Trois [États] membres de l’ONU encerclent les civils. Vous devriez avoir honte. Mais apparemment, cela vous rend encore plus motivés. Vous planifiez votre prochaine attaque. Êtes-vous incapables de ressentir de la honte ? [N’y a-t-il] Absolument rien [qui puisse vous faire honte] ? N’y a-t-il aucun acte de barbarie contre des civils, pas d’exécution d’un enfant qui vous dégoûte, même un peu ? Y a-t-il une chose sur laquelle vous n’allez pas mentir ? La justifier ? » [La Croix, Alep : tensions à l’ONU entre ambassadeurs russe et américain, 14 décembre 2016. Note FP : Les mots entre crochets sont repris par moi de la version anglaise.]

M. Churkin au Conseil de sécurité de l’ONU,
13 décembre 2016

Le représentant de la Fédération de Russie à l’ONU, Vitaly Churkin, devait remettre Mme Power et son pays à leurs vraies places : « Je trouve très étrange la déclaration de la représentante américaine qui parle comme si elle était Mère Teresa. Souvenez-vous, s’il vous plaît, du pays que vous représentez. Souvenez-vous de ses actions passées, et ensuite vous pourrez nous donner des leçons de morale. Quant aux disparitions de masses, aux disparitions et aux représailles contre les civils, nous n’avons pas reçu ces informations. » [Idem. Note FP : La traduction « Souvenez-vous de » vient de moi. En effet, celle-ci … « Rappelez-vous de » n’est pas correcte ; il faudrait dire « Rappelez-vous le pays », « Rappelez-vous ses actions ».]

Représentant permanent de la République Arabe Syrienne,
Houssam-Eddin Ala,
au Conseil de sécurité de l’ONU,

13 décembre 2016

Le camp occidental tentait d’autant plus de faire jouer le rapport de forces verbal que le rapport de forces des armes n’était pas en sa faveur sur le terrain.

Suite : IV. 55 – L’éclaircie syrienne qui vient de la Russie et de la Turquie

Françoise Petitdemange
24 mai 2017


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