La « religion suprême » de la France exerce son droit de vie et de mort partout dans le monde

Au-delà des propos tenus par Claude Bartolone le 13 janvier 2015 devant l’Assemblée nationale française dont il est le président en exercice, propos tout d’abord rédigés par écrit, il y a ce qu’il a pu dire en direct et en réponse à des questions posées dans le feu d’une discussion, à l’occasion du Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI, le 18 janvier suivant.

Autrement dit, il y a quelques chances qu’un minimum de vérité puisse en jaillir… Tentons l’expérience d’y regarder de plus près, en commençant par cette question du journaliste qui dirigeait l’émission de ce jour-là, Jérôme Chapuis :
« Vous avez prononcé une phrase tout à l’heure dans la première partie. Vous avez dit : « Les mots nourrissent les actes. » La une du dernier numéro de « Charlie Hebdo » qui représente à nouveau le prophète Mahomet suscite la colère de nombreux musulmans à travers le monde. Dix personnes sont mortes hier dans des manifestations au Niger. On brûle des drapeaux français au Pakistan. Quelle attitude doit avoir la France face à tout cela ? »

C’est dit : il y a de la colère, du feu et de la mort… Réponse de l’homme qui est le fruit premier du suffrage universel français tel qu’il s’exerce à travers les député(e)s…

Claude Bartolone : « Intraitable sur les valeurs de la République. Intraitable. Le jour où l’on affaiblit ce socle, nous sommes renvoyés les uns les autres à notre communauté ou à notre religion, et c’est le vivre ensemble qui est menacé. D’ailleurs, ces terroristes, ces assassins, c’est ce qu’ils ont essayé de faire comme première victime. Moi, je veux que l’on réussisse – même si cela prendra un peu de temps – regardez le temps qu’il a fallu pour faire accepter à la religion catholique le fait qu’il y a une religion suprême pour chacun d’entre nous, c’est la religion de la République. »

armée française

« Intraitable » – jusqu’à faire des morts un peu partout à travers le monde musulman. Voilà à quoi se trouve désormais engagé le suffrage universel français… Sera-ce tenable longtemps ? Là est la véritable question. Mais ce n’est certainement pas ici qu’elle pourra trouver sa réponse…

Il y a plus urgent. C’est que, tout à coup, nous venons d’apprendre « qu’il y a une religion suprême », la « religion de la République ». Avant de considérer ce qui peut en être le véritable contenu (1789, tu m’entends ?), remarquons très tranquillement que la lutte contre la religion catholique a valu tant qu’il pouvait y avoir une sorte de continuité, à l’intérieur des institutions républicaines, avec la monarchie de droit divin qui, elle, était effectivement en synergie directe avec la réalité même à la fois du pouvoir économique, politique et religieux de l’Église catholique. Ce n’était donc pas la religion dans son contenu qui était visée, mais seulement la domination qu’avec ce contenu elle était susceptible de vouloir exercer encore et toujours au beau milieu d’une république laïque.

Évidemment, en proclamant une religion républicaine, il s’agit de sortir de la laïcité, et d’entreprendre une croisade d’un goût plus que douteux qui pourrait bientôt être celui du sang et des larmes. C’est bien ce que veut nous dire Claude Bartolone. C’est bien ce qu’il nous dit : avec cette « religion suprême de la République », la catholique et toutes les autres religions, y compris, comme nous le verrons en développant le contenu de cette nouvelle religion, ce qui n’en est pas : l’athéisme, n’ont qu’à bien se tenir… Claude Bartolone et ses amis républicains seront « intraitables sur les valeurs de la République. Intraitables. » Or, puisqu’il passe très allègrement sur les morts engendrés ailleurs dans le monde par Charlie Hebdo, il en ira de même ici, en France. Il va falloir se plier à la « religion suprême  » ou périr.

C’est déjà un appel au meurtre.

De sorte qu’Éric Revel, qui n’en croit manifestement pas ses oreilles, revient à la charge :
« En allant au bout de votre raisonnement : « Les mots nourrissent les actes »… Lorsque vous êtes un musulman, et que vous habitez au Niger, ou au Pakistan, est-ce que le fait d’avoir une caricature comme celle qui est proposée à la une de « Charlie Hebdo » ne va pas, à un moment donné ou à un autre, nourrir les actes ? Jusqu’à quel point la liberté d’expression française peut vous servir de paravent ? C’est vous qui avez pris cette phrase. »

Avant de donner la parole au président de l’Assemblée nationale française en 2015, il faut souligner l’apparition, dans la bouche du journaliste, de cette curieuse formule : « servir de paravent ». S’agissant de faire injure à l’islam dans son entier, il est fort beau de proclamer sa foi en la « liberté d’expression  » de la « religion suprême », celle de la République impérialiste, au moment où elle attaque, de toute la force de caricatures ordurières, des personnes qui vivent si loin d’elle dans le monde… C’est fort joli, cette mondialisation, pour pas cher, et qui frappe là où elle doit frapper en se déplaçant à la vitesse de la lumière… ou à peu près.

Et voilà ce qui se répond à Paris, en janvier 2015, par délégation du suffrage universel…

Claude Bartolone : « Vous voyez bien que, sur cette question… Je vais aller jusqu’au bout… Vous voyez bien que sur cette question, ce n’est pas la couverture de « Charlie Hebdo » qui provoque cela. C’est beaucoup plus l’interprétation – par un certain nombre de responsables qui, quelquefois, ont des intentions politiques – de ce dessin. Vous croyez qu’au Niger, ils avaient l’habitude de lire « Charlie Hebdo  » ?  »

Éric Revel : « Oui mais, maintenant, ils l’ont lu, précisément… Parce que sur Internet, ils l’ont vu… Quelle couverture, en tout cas ! »

Claude Bartolone : Ils l’ont vu. Ils l’ont lu. D’accord, mais, quelle que soit la couverture, il y a manière et manière de le voir, et nous, notre interprétation pour la France, et d’ailleurs, c’est pour ça qu’il s’est arraché, qu’il s’est vendu à plus de sept millions d’exemplaires. Nous avions, en regardant cette couverture, l’idée de dire : voilà, c’est « Charlie Hebdo » qui continue dans sa veine, que lui permet la liberté de la presse, et qui se voulait même, comment dire ?, avec un dessin pour calmer le jeu. »

Sept millions !… La guerre, clef en mains !… partout où le gouvernement français et ceux qui vont le suivre décideront de frapper.

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Michel J. Cuny


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