Dans une lettre qu’il adresse à George 1er, roi d’Angleterre, le 6 octobre, probablement de l’année 1725, Voltaire, le chantre de la bourgeoisie française et pourfendeur des religions, ne dédaigne pas de s’adresser, en ces termes, au monarque étranger : « Il y a longtemps que je me regarde comme un des sujets de Votre Majesté. J’ose implorer sa protection pour un de mes ouvrages. C’est un poème épique dont le sujet est Henri IV, le meilleur de nos rois. La ressemblance que le titre de père de ses peuples lui donne avec vous, m’autorise à m’adresser à Votre Majesté. » (Voltaire – L’or au prix du sang, Editions Paroles Vives 2009, page 24) Mais Voltaire ne craint pas, ici, de froisser Sa Majesté très protestante, puisque l’ex-roi de Navarre, Henri IV, était appelé Le Réformé.
En janvier-février 1727, il est enfin reçu par le roi George 1er. Le livre, vendu en souscription dans une édition luxueuse, connaîtra un fort succès auprès de la haute société anglaise pas mécontente de soutenir cet assaut contre la France très catholique. « Les évaluations des contemporains oscillent entre 30.000 et 150.000 livres (de 150 à 750 années de travail !…). Voilà donc le prix d’une sorte de trahison de « haut vol » ?… Il semble bien que oui. Pour s’en convaincre, il suffit de reprendre la liste des souscripteurs pour voir apparaître, ainsi que l’écrit René Pommeau, l’essentiel du « corps diplomatique de l’Europe protestante : ambassadeurs d’Angleterre en exercice ou en retraite, envoyés à Londres de la Hollande, du Danemark, du Brunswick, de la Suède. Apparemment Voltaire avait choisi son camp, qui n’était pas celui du roi très-chrétien ». » (Idem, page 28)
Suite : Voltaire, pour quoi faire ?
Michel J. Cuny – Françoise Petitdemange