Le 2 septembre 1945, le Viêt Minh, qui était alors un mouvement en lutte contre la colonisation et fondé par le PCI (Parti Communiste Indochinois), avait proclamé, par la voix de son chef, Hô Chi Minh, l’indépendance de la République démocratique du Viêt Nam. Aussitôt, l’envoi d’un corps expéditionnaire français en Indochine, décidé par le seul Charles de Gaulle, président du Gouvernement provisoire de la République, signait le début de la guerre d’Indochine. Le premier détachement français avait débarqué, à Saïgon, dix jours plus tard, le 12 septembre 1945. À partir de cette date, des troupes, appartenant aux premières unités, étaient envoyées quasiment tous les mois, jusqu’au 19 juin 1946.

Deux camps allaient s’affronter : celui de la France et de ses alliés (l’État du Viêt Nam, le Cambodge, le Laos), soutenus par les États-Unis ; celui des organisations politico-militaires luttant pour l’unité et l’indépendance du Viêt Nam, la République démocratique du Viêt Nam ou Viêt Minh et ses alliés (le Pathet Lao ou État du Laos indépendantiste, les Khmers Issarak ou Khmers indépendants ou Khmers libres), soutenus par la Chine et l’URSS.
Le 23 novembre 1946, les canons de trois navires de guerre français avaient ouvert le feu sur la ville et le port d’Haïphong, principalement sur le quartier annamite, dont les maisons étaient serrées les unes contres les autres, faisant des milliers de morts parmi la population civile : certains, comme l’amiral Battet, parleront de 6.000 morts ; d’autres, comme Henri Martin, qui, après la Libération en France, s’était engagé pour cinq ans dans la Marine, et qui avait été envoyé, comme second maître mécanicien, en Indochine, estimeront à plus de 6.000 le nombre de morts.
En 1954, la guerre coloniale française, qui dure depuis près de dix ans, se poursuit. Le 1er février, les soldats d’Afrique (du Maghreb et d’autres pays africains), parmi lesquels de nombreux Noirs, qui ont été enrôlés dans le Corps expéditionnaire français en Extrême-Orient pour une guerre qui n’est pas la leur, constituent à peu près 43,5 % des Forces terrestres (autochtones non inclus). Depuis le 13 mars, les forces de l’Union française constituée de la France et de l’État du Viêt Nam, commandées par le colonel Christian de Castries nommé général au cours de la bataille, s’opposent aux forces de la République démocratique du Viêt Nam (ou Viêt Minh), commandées par Võ Nguyên Giáp, dans la cuvette de Diên Biên Phu : ce sera le début de la fin pour la France coloniale. Mais cette guerre n’en finit pas de finir, ajoutant les morts aux morts.
Les dirigeants de la Birmanie, de l’Île de Ceylan, de l’Inde, de l’Indonésie et du Pakistan décident de se réunir, du 28 avril au 2 mai, à Colombo, dans l’Île de Ceylan (qui avait obtenu son indépendance le 4 février 1948), dans le but premier d’étudier les moyens d’accélérer la fin de cette guerre qui détruit l’un des pays voisins. D’autres questions sont aussi abordées : le nucléaire et ses armes, et l’entrée, depuis le 24 octobre 1945, de la Chine aux Nations Unies… Un sujet d’importance est porté à la réflexion : la guerre politico-économico-militaire que se livrent, depuis la révolution russe de 1917, les USA et l’URSS, par pays interposés, en attirant, dans un camp ou dans l’autre, les autres pays du monde, et qui, à partir de 1947, a pris le nom de « guerre froide », laquelle oppose désormais deux blocs, le bloc de l’Ouest, les USA (United States of America – Amérique du Nord) et leurs alliés, et le bloc de l’Est, l’URSS (Union des Républiques Socialistes Soviétiques) et ses alliés, autrement dit, les régimes non communistes ou plutôt anti-communistes et les régimes socialistes à tendance communiste. Les participants se séparent, non sans avoir décidé d’organiser une autre Conférence devant rassembler les pays du Tiers-Monde qui sont parvenus à se libérer de la colonisation et donc à accéder à l’indépendance.
Cinq jours après la Conférence de Colombo, le 7 mai 1954, la France coloniale, après une résistance de près de soixante jours, sera défaite à Diên Biên Phu : une fois leur camp retranché tombé aux mains des forces de la République démocratique du Viêt Nam, l’armée coloniale sera contrainte à la capitulation.
Les Accords de Genève, qui seront signés le 21 juillet, et dont l’entrée en vigueur sera fixée au 22, entre la République française et la République démocratique du Viêt Nam, marqueront la fin de la guerre d’Indochine : la France coloniale devra évacuer l’intégralité du territoire vietnamien. Le Viêt Nam sera divisé en deux territoires : Viêt Nam du Nord et Viêt Nam du Sud. Cependant, l’État du Viêt Nam, qui a collaboré avec les forces coloniales françaises contre la République démocratique du Viêt Nam, et les États-Unis refuseront de signer la déclaration finale, et, donc, le non-respect de ces accords d’armistice qui s’ensuivra mènera à la guerre du Viêt Nam ou deuxième guerre d’Indochine.
Françoise PETITDEMANGE
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