Par Issa Diakaridia Koné
Observateur international du procès intenté en 1993 au général Moussa Traoré, président de la République du Mali qui avait été renversé par un coup d’Etat le 26 mars 1991, M. Laïty Kama nous rapporte une information troublante :
« Moussa Traoré, lors de son interrogatoire qui a duré plusieurs heures, s’est déclaré victime « d’un complot ourdi par le Parti Socialiste et le Gouvernement Français avec la complicité des associations maliennes dites démocratiques ». »
En mars 1991, le président de la République française était… François Mitterrand. Quant au gouvernement, il était dirigé depuis le 24 juin 1988 par Michel Rocard qui allait le quitter le 16 mai 1991. Revoici donc la colonisation qui paraît pointer à nouveau le bout de son nez.
Mais, revenant tout d’abord à la question des faits – et tout spécialement aux responsabilités dans la répression extrêmement brutale des manifestations -, l’ancien président Moussa Traoré a persisté, à l’audience, dans sa position initiale :
« Il a maintenu n’avoir donné aucune instruction ou aucun ordre pour tirer sur qui que ce soit, rejetant la responsabilité de la répression sur les officiers qui étaient chargés du maintien de l’ordre. » (page 14)
Or, nous savons que, par son refus de mettre en cause l’éventuelle responsabilité du lieutenant-colonel Bakary Coulibaly en le convoquant devant la Cour d’Assises, l’accusation a interdit tout approfondissement sur ce dernier point.
Mais comment le réquisitoire du ministère public a-t-il choisi de s’en prendre au général Moussa Traoré ? C’est ce que nous allons voir maintenant avec M. Laïty Kama.
Il remarque, tout d’abord, comment l’intervention de madame Le Procureur Général a été découpée. Alors que le procès a lieu devant une Cour d’Assises, et pour des violences récentes, plus de la moitié du réquisitoire a concerné le système politique lui-même :
« Sur les 7 heures qu’il a duré, quelque quatre heures ont été consacrées au procès en règle du régime de Moussa Traoré depuis son arrivée au pouvoir par la grâce d’un coup d’état, le 19 novembre 1968, jusqu’à son effondrement, le 26 mars 1991. » (page 17)
C’est que, selon le réquisitoire, c’est bien ce type de régime qui est à l’origine de tout… et, par conséquent, des violences récentes (ce que l’accusation n’a pas réussi à démontrer), tout autant que des violences perpétrées de 1968 à 1978 (qui n’ont pas à intervenir ici, sauf si l’accusation veut, à tout prix, viser l’ensemble du régime politique conduit par Moussa Traoré) :
« Pour le Ministère Public, ce régime qui ne devait durer en théorie que 6 mois d’après les auteurs du coup d’état, s’est vite empêtré dans une logique de répression, de tortures, d’assassinats politiques. Logique dont ont été victimes, entre autres, le Premier Président du Mali indépendant Modibo Keita et ses compagnons envoyés à Kidal pendant 10 ans, sans inculpation ni jugement et dans des conditions sanitaires effroyables, des leaders estudiantins, des officiers de l’armée, des responsables gouvernementaux. » (pages 17-18)
Il faut y insister : ces faits anciens sont inutilisables pour le présent procès… Or, en ce qui concerne les derniers événements, ayant renoncé à entendre le lieutenant-colonel Bakary Coulibaly, l’accusation ne peut plus parler que d’éventuelles concordances :
« S’agissant de Moussa Traoré qui a nié en bloc les accusations d’assassinats et de coups et blessures volontaires portées contre lui, le Ministère Public tire sa culpabilité d’un certain nombre d’indices concordants. » (page 18)
Si les éléments de fait n’importent pas, si une sorte de concordance générale suffit, toute démonstration est désormais inutile, puisque tout n’a plus besoin que de dépendre…
« D’abord du caractère totalitaire de son régime qui fait qu’il est au début et à la fin de tout. » (page 18)
Or, ce « tout » du « totalitarisme » provient nécessairement du « chef »… Plus aucun exécutant n’a besoin d’être mis en cause. Le chef « sait » tout, et doit donc « répondre » de tout. La seule preuve à rapporter, c’est l’application, au général Moussa Traoré, de la formule qui affirme : « régime totalitaire »…
« Peut-on imaginer un seul instant qu’il n’ait été au courant de rien, ainsi qu’il le prétend, s’agissant des massacres de Mars 1991 ? Il a toujours contrôlé les événements, comme ce fut le cas déjà pour ceux de Janvier 1991, puisqu’il est établi, qu’au cours d’une réunion tenue le 22 Janvier, il avait demandé que la répression soit davantage accentuée à Bamako, car c’est là qu’il y avait les cadres et les étudiants opposés à son pouvoir. » (page 18)
Il semble donc qu’à la différence des autres, un État réputé « totalitaire » n’a pas le droit de défendre les institutions de son pays. Et même lorsqu’il a acquis la certitude que les attaques viennent de l’étranger…
« Le Ministère Public fait ensuite état d’une réunion informelle tenue le 26 Janvier au cours de laquelle, Moussa Traoré a informé l’assistance qu’une tentative de déstabilisation de son régime de la part de la France et plus exactement de l’O.N.G. « France Libertés » avec la complicité d’associations maliennes telles que l’A.E.E.M. et le CNID, était en cours et qu’il convenait d’y faire face avec vigueur, selon ses mots. » (page 18)
Pour finir, l’accusation utilise un dernier argument dont le contenu n’est rien qu’un proverbe : « qui ne dit mot consent »…
« En troisième lieu, Madame Le Procureur Général relève une lettre envoyée par le Ministre de la Justice au Chef de l’Etat, l’informant des incidents de Sikasso et de la nécessité dans laquelle s’étaient trouvées les forces de l’ordre de tirer à balles réelles pour se dégager de l’encerclement de la foule. Aucune réaction de la part de Moussa Traoré, ce que le Parquet assimile à une approbation. » (page 18)
Ainsi, le général Moussa Traoré ne pouvait-il qu’être réputé coupable de « tout », sans preuves matérielles… , et au seul titre de l’État totalitaire qu’il représentait… et qui réside dans le fait de ne pas être conforme aux normes de désignation des autorités politiques que défendent les Occidentaux… quand cela les arrange.
Issa Diakaridia Koné
Tous nos dirigeants africains qui s’opposent à la politique occidentale subissent ce genre de complot. Il est temps d’arrêter cette mauvaise politique menée par l’occident.
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A reblogué ceci sur josephhokayem.
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